Les incursions de la banque de financement et d’investissement sur le segment des sociétés françaises en hypercroissance sont rares. C’est dire le potentiel de Voodoo, l’éditeur de jeux mobiles fondé par Alexandre Yazdi et Laurent Ritter.

Entre les succès internationaux d’Ubisoft et ceux de Gameloft, la France ne manque pas de champions industriels dans l’univers des jeux vidéos. À l’avenir, il faudra aussi compter avec Voodoo, la société fondée par Alexandre Yazdi et Laurent Ritter en 2013, qui s’attaque au marché du « casual game » sur smartphone. Il s’agit d’une activité déjà bien rôdée : le studio cumule plus de 150 millions de joueurs actifs par mois ! Et cela n’aura pas échappé à Goldman Sachs, l’une des plus belles signatures de Wall Street, qui investit 200 millions de dollars (173 millions d’euros) dans Voodoo en échange d’une participation minoritaire au capital.

L’international en ligne de mire

À l’image de ses jeux, Voodoo ambitionne d’utiliser son capital de points pour grandir et relever des défis toujours plus ardus. Le marché mondial du jeu mobile est en pleine explosion. Selon le cabinet spécialisé Newzoo (voir infographie), les recettes de l’industrie se chiffrent autour de 70 milliards de dollars en 2018 (+ 25,5 % de croissance sur un an). La pépite tricolore n’a jamais été autant en capacité d’investir et on ne peut s’empêcher de penser qu’elle ira plus loin que la simple ouverture de bureaux à travers le globe – Voodoo vient de s’implanter à Berlin et envisage d’y embaucher quelques dizaines de développeurs pour ses prochains titres. La poursuite d’une croissance rapide passera aussi par le rachat d’autres sociétés. Et l’arrivée de Goldman Sachs tombe plutôt bien puisque « The Firm » est une pointure internationale en matière de conseil M&A. De plus, le marché reste encore très éclaté avec de nombreux studios indépendants, loin d’avoir exprimé tout son potentiel. Voodoo a donc une vraie carte à jouer sur le terrain de la consolidation. Seuls King Digital (le créateur de Candy Crush racheté par Activision Blizzard pour 5,9 milliards de dollars), Zynga (Farmville) et Supercell (le finlandais à l’origine de Clash Royale) semblent évoluer sur une autre planète. En attendant de pouvoir soutenir la comparaison avec ces géants, Voodoo doit miser sur l’un de ses avantages concurrentiels, la diversification des activités.             

Au-delà du jeu

Voodoo est un éditeur de jeux mobiles abordables, du quotidien, et va le rester. « Paper.io » et « Snake vs Block » demeurent ses principales réussites avec trente et vingt millions de téléchargement respectifs. La société continue à recruter des « game designers » et divers spécialistes du monde vidéoludique, et « Paper.io 2 » vient de sortir. Malgré cela, ces licences mondialement reconnues ne constituent pas la première source de revenus de la start-up installée à Paris, Strasbourg et Montpellier. Non, Voodoo préfère conseiller d’autres studios dans leur stratégie de rétention des joueurs et de monétisation de l’audience. Cette activité représente 75 % de son chiffre d’affaires, tenu secret. Ce modèle lui permet à la fois de bâtir une communauté d’experts de l’industrie autour de ses compétences et de se protéger contre l’éventualité d’un échec de lancement de jeu. Si tout se passe bien, Voodoo dépassera le seuil critique du milliard de téléchargements à la fin de l’année. Par ailleurs, une partie de l’argent apporté par Goldman Sachs servira à recruter des professionnels de l’architecture des réseaux et des serveurs. Toujours plus de diversification !

 

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Firmin Sylla

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