La chaîne Burger King est connue pour son célèbre Whopper, mais aussi pour sa communication audacieuse et authentique. Comment se conçoit-elle ? Réponse avec Alexandre Simon, directeur marketing France.

Décideurs. Burger King se démarque par son ton humoristique lors des campagnes de communication. Quel est l’ADN de la marque ?  

Alexandre Simon. Notre ADN est lié à la simplicité de sa raison d’être. Le marketing a souvent tendance à complexifier les choses, alors qu’il faudrait au contraire simplifier ce que l’on fait pour que les consommateurs, ainsi que les équipes se retrouvent dans l’identité de la marque. Cet objectif se résume en cinq mots : "Donner un plaisir authentique et accessible à tous".  

D’abord, Burger King considère que cette maxime est une vraie mission de marque. Notre ambition est de déculpabiliser le consommateur et sa manière de consommer souvent pointée du doigt. L’authenticité ensuite, car la marque communique de manière décomplexée et sans jamais se prendre au sérieux. C’est pour cela que nos publicités génèrent la sympathie et l’humour auprès des consommateurs. Aujourd’hui, les marques procèdent toutes de la même manière. Pour nous, le marketing efficace doit être sincère, pour transmettre ses messages sans se poser trop de questions. C’est une prise de risque audacieuse qui fait que Burger King a toujours le bon timing ou est toujours en avance sur son temps.  

L’utilisation des réseaux sociaux est-elle intrinsèque à l’image de marque Burger King ?  

En 2013, lorsque Burger King a fait son grand retour en France, nous n’avions pas de budget média ou marketing pour opérer à travers les canaux traditionnels. La marque s’est donc créée elle-même sur les réseaux sociaux, grâce à l’engouement des Français qui relayaient eux-mêmes l’ouverture de nos restaurants. Nous avons donc utilisé ce lien direct avec eux, pour diffuser des campagnes spontanées comme "Burger King dans ta ville", qui conseillaient aux consommateurs de déménager près d’un de nos restaurants.   

Contrairement à d’autres grandes marques qui doivent maintenant s’adapter au digital, nous avons fait tout l’inverse. Si Burger King communique à la télévision depuis 2017, notre marque a conservé cette identité et ce ton si particulier né de la complicité installée avec les internautes. Il faut savoir abandonner la marque aux consommateurs pour les laisser se l’approprier. C’est pour cela que Burger King est incontestable et que notre communauté est très engagée auprès de notre marque.  

On vous considère souvent comme le "King" de la communication, quelle est votre stratégie depuis le début de la crise sanitaire ? 

Nos restaurants étant fermés, nous avons dû adopter une communication plus large. Burger King a donc souhaité se rendre utile et mettre son savoir-faire au profit de l’objectif général contre la pandémie. Nous avons commencé par une série de Tweets pour rappeler l’importance des gestes barrière et des mesures de distanciation sociale. Puis, pendant le premier confinement, nous avons lancé la campagne "Les burgers de la quarantaine". En partenariat avec Uber Eats, nous avons livré des kits de fabrication de burgers et avons révélé nos recettes au grand public. Une fois encore, il s’agissait là de donner du plaisir aux gens en leur permettant de réaliser eux-mêmes leurs burgers favoris, tout en restant chez eux. Notre stratégie est de continuer de créer du lien entre les gens et notre marque, mais pas que. 

"Continuez de consommer, même si c’est chez notre principal concurrent"

Effectivement, Burger King a fait preuve de solidarité pour soutenir d’autres grandes chaînes de restauration rapide, pouvez-vous nous en parler ? 

Depuis plus de cinq mois, toutes les salles de restaurant sont fermées, et même si la vente à emporter ou la livraison permettent encore de maintenir une activité, celle-ci est très faible. Nous avons donc souhaité mettre en place une communication solidaire à destination de tout le secteur de la restauration, sans faire de distinction entre la restauration dite rapide et la restauration traditionnelle. Nous souffrons tous de cette crise sanitaire et sommes tous inquiets face à l’incertitude qu’elle induit. Il s’agissait donc de faire passer un message fort : "Continuez de consommer, même si c’est chez notre principal concurrent". Cette communication a été très bien reçue car le monde dans lequel nous vivons met souvent en opposition les petites et les grandes marques, le business digital et le business traditionnel. Ici, au contraire, il s’agissait d’utiliser la rivalité de marque entre Burger King et MacDonald’s afin de tirer une sonnette d’alarme qui concerne l’ensemble de nos métiers.  

Nous continuons d’ailleurs en ce sens avec des actions concrètes. Depuis plusieurs mois maintenant, le compte Instagram de Burger King ne communique plus pour notre marque. Nous mettons en avant auprès de notre communauté, d'autres restaurateurs qui se battent pendant cette pandémie pour poursuivre leur activité en faisant de la vente à la livraison et à emporter.   

S’agissant des engagements RSE, comment Burger King s’intègre-t-il dans une démarche de responsabilité environnementale ? Quelles sont vos actions en la matière ? 

L’engagement, la responsabilité sociale et environnementale sont très importants pour nous. C’est pourquoi garder notre singularité jusque dans notre manière d’agir importe tant. Nous faisons en sorte que les choses soient telles qu’elles nous semblent justes, et non telles qu’elles pourraient nous être imposées.  

Par exemple, depuis la fermeture des restaurants, il y a une baisse considérable des volumes de vente de pommes de terre, l’aliment le plus consommé en restauration. Alors, pour soutenir les producteurs, nous avons acheté, il y a quelques semaines, près de 200 tonnes de pommes de terre qui ont ensuite été reconditionnées en sac d’un kilo, puis distribuées gratuitement aux clients du drive Burger King.  

"70% de nos produits sont français, contre 15% en 2015"

Ensuite, le plastique est un enjeu capital. Désormais, sur dix-sept de nos emballages, treize sont en carton. Nous travaillons à la suppression de l’ensemble de nos packagings en plastique pour la fin du premier trimestre 2021. Cela représente 700 tonnes de matériaux éliminées de nos restaurants. Par ailleurs, l’enseigne offre aussi le choix au consommateur en proposant un menu enfant sans jouet, donc moins cher. Ce type d’initiative doit être l’objectif d’une marque moderne.  

Tous nos restaurants sont également équipés de poubelles de tri. Un projet de collecte mutualisée des déchets avec les autres enseignes de fast-food est d’ailleurs actuellement à l’étude. Celui-ci devrait voir le jour d’ici la fin de l’année.  

Enfin, depuis quelques mois, nos produits ne contiennent plus aucun conservateur, ni arômes artificiels ou colorants. De plus, 70% de nos produits sont français, contre 15% en 2015. La progression de Burger King en la matière est donc rapide. Preuve de notre volonté d’élargir et renforcer nos pratiques responsables.  

Quelle est votre feuille de route pour 2021 ? 

Nous sommes dépendants des mesures sanitaires et avons peu de visibilité quant aux événements à venir. Notre objectif est double : continuer d’enrichir cette connexion avec nos consommateurs et les divertir tout en adressant des messages importants, mais aussi légers, pour ne pas perdre notre identité.

Nous profitons également de cette période pour travailler sur les innovations. Nous élaborons donc en ce moment-même, un burger à base de plantes. Nos produits doivent être meilleurs demain qu’hier.  

Propos recueillis par Laura Breut 

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