Tout s’accélère pour les flottes d’entreprise. À commencer par l’électrification de leur parc qui s’annonce comme la priorité de l’année. Il faut dire que les incitations fiscales tout comme les contraintes réglementaires laissent peu de marges de manœuvre aux responsables de parcs. Sur fond de crise sanitaire, certains visent déjà le coup d’après tandis que se met en place tout un écosystème de la mobilité en entreprise.

Crise sanitaire et ralentissement de l’économie n’ont eu qu’un impact relatif sur les ventes réalisées l’an passé auprès des entreprises. À l’inverse des ménages qui ont reporté le remplacement de leur voiture, les flottes ont assuré le renouvellement de leur parc automobile. Avec 755200 immatriculations de voitures particulières et de véhicules utilitaires l’an passé, le marché des flottes n’a en effet reculé que de 16,5% l’an passé. En comparaison, le marché global des ventes de véhicules en France s’est effondré de 24 % l’année dernière. Autre constat très attendu : les flottes électrisent leurs parcs. En 2020, la part de vente des diesel s’est considérablement réduite au sein des flottes automobiles. Ces modèles carburant au gazole n’ont représenté que 227400 immatriculations sur le marché B2B ; soit une baisse de 26 %.

On s’en doute, c’est aux motorisations électriques et hybrides que l’on doit cette transformation du parc automobile des entreprises. Dans le même temps en effet, ce sont 13,5 % de véhicules électrifiés qui ont rejoint le parc des sociétés ; soit 102164 véhicules « propres » dont 32500 modèles hybrides rechargeables (+276 %) et 29 780 véhicules 100 % électriques (+ 43 %). Ce grand mouvement d’électrification du parc des entreprises est dû aux normes imposées aux constructeurs par la Commission européenne. Elles les ont obligés à réduire à 95 g par km le niveau de l’ensemble des émissions de CO2 de leurs modèles commercialisés dans l’année. C’est dire si, pour les constructeurs, la priorité en 2020 s’est portée sur la vente de véhicules électriques et hybrides à faibles émissions.

Changements législatifs

Mais d’autres contraintes s’imposent aux entreprises et les poussent à adopter des véhicules à faible émission de CO2 dans leurs parcs. Il en va ainsi de l’instauration des zones à faible émission (ZFE). Après Paris, Lyon et Grenoble, c’est la métropole du Grand Paris ainsi que sept nouvelles villes qui vont fermer les portes de leurs centres-villes aux véhicules les plus polluants (Aix, Marseille, Montpellier, Nice, Rouen, Strasbourg, Toulon et Toulouse). Et d’ici à 2025, toutes les agglomérations de plus de 150 000 habitants devront mettre en place une ZFE. De même, la loi d’orientation sur les mobilités (LOM) impose à partir de 2022 aux entreprises qui disposent de plus de 100 véhicules que leur parc soit renouvelé avec une part de 10 % de véhicules à faible émission. Ce quota de verdissement du parc des entreprises passera à 20 % en 2024, 35 % en 2027 et 50 % en 2030.

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BMW IX3

Chez le loueur ALD Automotive, la part de véhicules électrifiés (électriques et hybrides) a progressé de 17 % l’an passé, explique Guillaume Maureau, directeur général adjoint. "C’est principalement le fait des modèles hybrides rechargeables vers lesquels les car policy et les collaborateurs des entreprises se sont orientés l’an passé. Ces modèles hybrides rechargeables bénéficient d’un accompagnement fiscal et leurs ventes devraient croître encore deux années avant de parvenir à un palier, estime Guillaume Maureau. Ceux qui auront goûté aux modèles hybrides rechargeables passeront alors aux véhicules 100 % électriques." En attendant, il constate que le marché du véhicule électrifié dans les entreprises est loin d’avoir atteint une maturité et tout est fait pour que l’électrification des flottes se poursuive. "Les offres de nouveaux modèles se multiplient et surtout beaucoup de grandes entreprises du BTP ou des services commencent seulement à intégrer des véhicules électriques."

"BTP et services se mettent aux véhicules électriques"

Les flottes sous pression

Même constat chez le loueur Arval, lequel prévoit un fort volume de commandes de véhicules électriques et hybrides au premier semestre de la part des flottes qui voudront bénéficier de la prolongation des mesures incitatives du gouvernement. "Depuis le début de l’année, explique Ferréol Mayoly, directeur général d’Arval France, nous constatons aussi que les grandes entreprises multiplient les cotations, retardent leurs commandes et réfléchissent fortement à leur catalogue de nouveaux véhicules afin d’y intégrer des modèles électriques et hybrides." Une tendance que suit de près ce loueur dont l’ambition dans le domaine des immatriculations de véhicules électrifiés est de faire deux fois mieux que le marché et de parvenir à un parc en location de 500 000 véhicules en Europe, dont plus de 100 000 en France. Dans les faits, la fiscalité applicable en 2021 ne laisse plus de marge aux entreprises pour électrifier leur parc.

Comme l’estime le loueur Athlon qui a édité à cette occasion un guide de la fiscalité 2021 à l’attention des flottes, "la situation est limpide pour les entreprises: celles qui ne penseront pas transition écologique à chaque renouvellement de véhicule verront le coût d’usage de leurs flottes grimper en 2021". Le loueur appelle les entreprises à se saisir de la fiscalité pour profiter pleinement de "cette première année réellement incitative au renouvellement des véhicules d’entreprises pour des modèles plus propres. Plus de 750 000 véhicules neufs seront ainsi concernés en France soit près d’une immatriculation sur deux dans le pays ."

L’urgence d’un passage à l’électrique

Alphabet, filiale de location longue durée de BMW, a également publié cette année un guide de la fiscalité, qui propose un outil de simulation fiscale permettant aux gestionnaires de flottes de bâtir leur car policy en connaissance de cause. Pour Laurent Petit, chef du département marketing d’Alphabet, plusieurs moyens existent pour envisager la transition énergétique des flottes. "Il en va ainsi du plan de mobilité employeur (PDME). Sa mise en place au sein d’une entreprise permet de construire une stratégie de mobilité durable autour des trajets domicile-travail et encourage le développement d’une mobilité alternative à la voiture individuelle attribuée aux collaborateurs." Mais, pour l’heure, aux yeux de Laurent Petit, l’urgence est à l’intégration de véhicules électriques dans le parc des flottes. "La transition énergétique pour les entreprises, c’est cette année. Les flottes ont un an pour s’y engager car la refonte d’un parc tout comme la modification d’une car policy ne se font pas en un claquement de doigts." Autant dire qu’un embouteillage de véhicules électrifiés pourrait bien se profiler cette année à l’entrée du parking de certaines entreprises…

Jean-Pierre Lagarde

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