C. Boulanger (Richelieu Gestion) : "En Europe, il existe un vrai terreau pour l’analyse extrafinancière"
Décideurs. Comment votre société a-t-elle vécu cette année si particulière ? Avez-vous pu concrétiser votre objectif d’apporter un esprit thématique à votre gamme de fonds malgré le contexte ?
Christophe Boulanger. Dans un contexte difficile pour les acteurs de la gestion d’actifs, notre encours sous gestion a tout de même légèrement progressé en 2020, proche des 900 M€ (à mi-novembre 2020). Le redéploiement de la gamme de fonds, engagé dès l’arrivée d’Alexandre Hezez (CIO et gérant de Richelieu Harmonies), en mars 2019, commence à porter ses fruits. À côté de notre expertise historique sur les small & mid caps européennes, nous avons lancé Richelieu Harmonies (fonds d’allocation d’actifs), Richelieu Pragma (ex-Richelieu Special, fonds actions européennes multi caps, multi styles), Richelieu CityZen, enfin Richelieu America en décembre 2019. Notre volonté n’est cependant pas de gérer une gamme de fonds pléthorique. C’est pourquoi nous allons fusionner l’OPCVM Richelieu Croissance PME avec Richelieu Family Small Cap. L’idée est de pouvoir nous appuyer sur des fonds bien identifiés, incarnés par des gérants reconnus et disposant d’un track-record de grande qualité. Notre gamme est ainsi constituée de sept fonds : quatre investis sur les actions européennes, un fonds actions américaines, un fonds obligataire et un fonds diversifié.
Quelles valeurs ajoutées vous apportent vos nouveaux fonds Richelieu CityZen et Richelieu America ?
Plus de 50 % de notre gamme intègre aujourd’hui nativement des composantes ESG. Le fonds Richelieu CityZen en est l’illustration parfaite. Celui-ci est, en effet, investi dans des sociétés qui agissent en faveur d’une meilleure intégration des problématiques environnementales, sociales et de gouvernance. La diversification des thématiques sur lesquelles il se positionne permet de traverser les cycles. Ce fonds s’inscrit dans un cadre multithématique, durable et international, qui structure notre positionnement vis-à-vis du marché.
Le fonds Richelieu America, lancé en fin d’année 2019, bénéficie quant à lui de deux moteurs de performance. L’un stratégique sur une thématique de rendement et visant des sociétés connues pour leur capacité historique à générer des dividendes en croissance régulière. Et l’autre, plus tactique, une approche croissance, constituée d’entreprises impliquées dans des mégatendances structurelles. C’est aussi l’un des rares fonds ESG sur cet univers d’investissement.
« Les sociétés contrôlées par des familles ont une implication extrafinancière plus marquante que dans d’autres secteurs »
Si l’ESG s’impose comme une nouvelle norme de marché, la couverture des critères extrafinanciers par les acteurs de la finance durable sur le segment des small caps semble encore déficiente.
C’est un enjeu majeur pour les sociétés de gestion. Cette couverture n’est pas encore au niveau de celle des grandes et moyennes capitalisations. Plus on descend en taille d’entreprise, plus il est difficile de recueillir de l’information sur ces sujets. Prenons l’exemple du fonds Richelieu Family Small Cap. Lancé en 2014, ce dernier dispose d’un nombre d’investissements resserré. Avec ce modèle nos équipes de gestion ont une connaissance intime de chaque entreprise du portefeuille. Si les informations ne sont pas toujours délivrées par une agence de recherche et services ESG, nous sommes toutefois en mesure de collecter des données très précises, et de les suivre avec une grande rigueur. Par ailleurs, les entreprises sur lesquelles nous investissons sont le plus souvent détenues ou contrôlées par des familles. Il y a donc une forme de continuité, de durabilité, d’implication extrafinancière plus marquante que dans d’autres secteurs.
Quels sont vos projets de développement ?
Nous souhaitons nous appuyer sur les bonnes performances de 2020 pour développer la gamme existante. Nous voulons également capitaliser sur nos deux nouveaux profils de gestion sous mandat « transition ESG ». L’un étant géré de manière équilibrée, l’autre de façon plus dynamique. Par ailleurs, il n’est pas exclu que l’on soit un jour amené à lancer un fonds ayant une approche multithématique globale, dépassant le cadre du marché européen. En Europe, il existe un vrai terreau pour l’analyse extrafinancière. Si les États-Unis sont aujourd’hui en retard sur ces sujets, ils ont une capacité de réaction très forte. BlackRock, le premier gestionnaire d’actifs au monde, a récemment fait part de son intérêt à disposer d’une norme ESG globale. La société de gestion américaine est en mesure de donner le tempo et pourrait faire avancer cette cause.
Propos recueillis par Aurélien Florin