Après 35 ans dans l’industrie agroalimentaire, dont huit en tant que CEO de l’entreprise Benedicta, Olivier Marchand veut créer, avec deux associés, le premier fonds d’investissement Européen dédié à l’agroalimentaire, FnB Private Equity.

Décideurs. Lors de votre carrière d’industriel, vous avez côtoyé plusieurs fonds : Abenex et Equistone lors d’un premier LBO sur Benedicta, puis Ardian et Capzanine pour un second. Quels aspects de ce métier vous ont incité à créer votre propre fonds. 

Olivier Marchand. Avec Antoine Sage, nous nous connaissons depuis longtemps et tous deux avons longtemps travaillé dans l’agroalimentaire. À la suite de ces deux LBO, et d’un buy-in sur Marco Polo Foods en 2013-2015, nous avons envisagé de créer un fonds européen dédié au secteur. En parfaite adéquation avec notre expérience passée, ce projet a séduit des partenaires financiers grâce, notamment, à la mise en place d’une parité totale entre entrepreneurs et investisseurs. 

Nous voulons appliquer au monde de l’investissement ce que, pendant 35 ans, nous avons fait dans le monde de l’alimentaire en tant que managers. Nous souhaitons nous impliquer réellement dans le développement des PME. Travailler avec elles sur tous les aspects d’amélioration opérationnelle, logistique, mais aussi, les aider à croître géographiquement via des build-up, de l’export, des lancements de produits, une réorganisation de la stratégie de prix, etc. 

 

Décideurs. Quel avantage compétitif, les postes que vous avez occupés, vous donnent aujourd’hui sur vos concurrents ? 

O. M. On ne peut pas vraiment raisonner en termes de concurrence. Aujourd’hui il existe des fonds généralistes et des fonds sectoriels, et à partir du moment où, quel que soit son axe, un fonds vise le marché du mid-cap ou des PME, il tend à être sur le même terrain que nous. FnB s’adresse aux PME européennes de l’agroalimentaire. Nous projetons d’intervenir dans huit pays d’Europe de l’Ouest et pour l’instant nous sommes les seuls. Mais le point le plus différenciant de notre activité réside dans cette alliance d’investisseurs et d’entrepreneurs de terrain. J’ai une vision extrêmement pratique des difficultés que peuvent rencontrer les dirigeants, car je l’étais il y a encore très peu de temps. 

 

Décideurs. Quelle est votre définition de l’agroalimentaire ? 

O. M. On retient la définition la plus pure de ce qu’est l’industrie de l’agroalimentaire : la transformation de matières premières en produits alimentaires finis. Des interventions dans des métiers voisins, tels que la restauration ou l’emballage, sont clairement exclues. Nous visons les PME in bonis, valorisée 35 à 70 millions d’euros et réalisant un chiffre d’affaires compris entre 35 et 100 millions d’euros. Nous écartons les situations d’early stage ou de restructuring. C’est un marché extrêmement vaste, qui compte 4 200 entreprises, uniquement en Europe de l’Ouest. Parmi la trentaine de dossiers que nous avons déjà reçus, trois ont retenu notre attention. Dans l’idéal, nous investirons 7 à 15 millions d’euros, avec un ticket moyen à 10-12 millions. 

 

Décideurs. Au-delà du soutien financier, de plus en plus de fonds prennent un rôle de business partners vis-à-vis de leurs cibles. Est-ce votre position ? 

O. M. Bien sûr ! Nous n’envisageons absolument pas d’être absents du management des entreprises en portefeuille. La valeur ajoutée que l’on veut créer — liée à cette bipolarité investisseur/entrepreneur — passe nécessairement par une majorité de gouvernance. L’objectif est d’avoir la capacité d’impacter réellement la stratégie et les axes de développement des entreprises. Évidemment, certaines règles du private equity sont difficiles à contourner, aussi par exemple, notre système de gouvernance est plutôt classique. Nous avons quelques exigences spécifiques sur lesquelles nous ne transigeons pas. Les dirigeants des sociétés que nous souhaitons accompagner doivent participer à nos côtés au développement de leur entreprise. Ceci dans le but de créer un réel alignement d’intérêts entre eux, nos investisseurs et nous, FnB PE. 

 

Décideurs. Pensez-vous, un jour, passer à nouveau, côté industriel ? 

O. M. Ce n’est pas à l’ordre du jour. J’ai passé 35 ans côté industriel et si je me lance aujourd’hui, ce n’est pas pour reprendre une entreprise demain. 

 

 

Propos recueillis par Hania Aït-Taleb 

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