LVMH vs Kering, le match
Reconstruire Notre-Dame est coûteux. Pour faire face aux dépenses, dès le 15 avril 2019, date de l'incendie, François-Henri Pinault a annoncé débloquer la somme de 100 millions d’euros. De son côté, Bernard Arnault annonce un « don de 200 millions d'euros». Derrière cette preuve d’évergétisme, se cache une lutte sans merci entre les deux groupes qui dominent le marché du luxe. Décideurs a fait la comparaison.
1-Chiffre d'affaires : LVMH
Au niveau du chiffre d’affaires, tout va très bien pour les deux groupes. En 2018, le CA de LVMH a augmenté de 10% en un an tandis que chez Kering, la hausse est de 29% (37% pour Gucci !). Néanmoins, LVMH a un CA global bien plus élevé que son concurrent : 46,8 milliards d’euros contre 13,7 milliards d’euros. LVMH annonce un résultat net de 3,7 milliards d’euros. Il est de 6,4 milliards d’euros chez Kering.
2- Communication : LVMH
Sur le réseau social Facebook, LVMH est l’entreprise la plus populaire. Si sa propre page comptabilise 211 988 mentions « j’aime » contre 32 787 pour Kering, le décalage existe aussi entre les marques phares des deux groupes. Ainsi, les maisons Louis Vuitton, Christian Dior et Sephora cumulent à elles trois plus de quarante-sept millions de fans. En parallèle, Gucci, Bottega Veneta et Saint Laurent en enregistrent à peine plus de dix-huit millions.
Pourtant, la stratégie de communication de Kering est loin d’être ridicule. Pour dorer son image, l’entreprise a d’ailleurs signé un partenariat sur cinq ans avec le Festival de Cannes en 2014. De son côté, LVMH mise sur le mécénat. L’entreprise a financé la rénovation de monuments historiques comme celle du Château de Versailles et enrichi les collections de musées d’art. Au total, quarante-cinq expositions dans le monde ont déjà été soutenues par son action. Mais LVMH creuse aussi l’écart grâce à ses égéries. L’entreprise a su s’entourer des plus grandes stars de cinéma telles que Léa Seydoux (Louis Vuitton), Charlize Theron, Johnny Depp ou encore Nathalie Portman (tous les trois égéries de Dior) pour mettre ses produits en valeur. Une pratique beaucoup moins courante chez Kering qui mise sur des personnalités moins connues. À l’image de jared Leto et Lana Del Rey pour Gucci et de Cara Delevingne pour Saint Laurent.
3- Diversification : LVMH
Le groupe LVMH est propriétaire de soixante-dix maisons différentes. Le secteur du vin et spiritueux en représente vingt et une. Parmi les plus connues, on retrouve Dom Pérignon, Ruinart ou encore Hennessy. Cette branche a généré 4,6 milliards d’euros en 2015. Dans le secteur de la mode et de la maroquinerie, l’entreprise compte quinze marques, dont Louis Vuitton, Berluti, Fendi ou encore Christian Dior. Et l’activité de LVMH ne s’arrête pas là puisque l’entreprise s’est diversifiée dans les médias. Elle est propriétaire du groupe de médias Les Echos, du journal de presse financière Investir, de la chaîne radio Radio Classique, du magazine d’art Connaissance des arts et de la plateforme vidéo Nowness. De plus, elle détient également les hôtels de luxe Cheval Blanc, le constructeur de yatchs haut de gamme Royal Van lent et l’édifice parisien Samartine.
Pour tenter de rivaliser face au mastodonte, Kering opère différemment. Détentrice de dix-neuf marques dont seize appartenant à l’univers du luxe (Gucci, Bottega Veneta, Saint Laurent), l’entreprise a élargi son activité au secteur du sport & lifestyle. Un choix étonnant pour un groupe qui souhaite s’inscrire dans le prestige.
4- International : LVMH
Avec un réseau mondial de plus de 3 860 magasins dont 737 aux États-Unis, 951 en Asie, 1 021 en Europe et 407 au Japon, LVMH réalise 90 % de son activité à l’international. 18 % de ses ventes sont faites en Europe, 26 % aux USA, 7 % au Japon et 27 % en Asie. À titre de comparaison, Kering est présent dans 120 pays. L’entreprise possède 1 264 magasins dont 491 dans les pays émergeants, 326 en Europe de l’Ouest, où elle réalise 31 % de son chiffre d’affaires, 237 au Japon (10 % des ventes) et 210 en Amérique du Nord (23 %).
5- Dirigeants : LVMH
Le match se joue aussi à la tête des deux groupes. D’un côté Bernard Arnaud, de l’autre François-Henri Pinault. L’un a d’abord su s’imposer comme le maître à jouer de LVMH. Devenu actionnaire principal en 1989, il fait de Louis Vuitton - Moët Hennessy le plus grand groupe de luxe au monde en quelques années. François-Henri Pinault a hérité de l’empire Printemps-Pinault-Redoute (PPR), lorsqu’il prend les commandes à la place de son père en 2005. Il fait le choix de se séparer de grandes enseignes telles que Conforama, Printemps ou encore La Redoute pour opérer une transition vers les marques de prestige. Un tour de force réussi et approuvé par les actionnaires, qui acceptent à 99,66 % le nouveau nom Kering.
En 2019, la fortune de Bernard Arnault est estimée à 67 milliards d'euros. Ce qui, selon Forbes, fait de lui le Français le plus riche du monde. De son côté, en 2019, la fortune de François-Henri Pinault s'élève à 26,1 milliards d'euros, ce qui fait de lui le troisième Français le plus riche. Da fortune a augmenté de 12% sur une année..
Résultat : LVMH 5 – Kering 0
L’entreprise LVMH domine largement les débats. Bien que François-Henri Pinault ait manœuvré de belle manière une reconversion vers le milieu de la mode, son adversaire s’impose à la fois comme le plus reconnu et le plus puissant. Son empire semble impossible à détrôner. Le seul espoir de Kering est de continuer à racheter de nouvelles marques quitte à ce qu’elles ne s’inscrivent pas dans l’univers du luxe français. Mais à quel prix ? D’autant que cette option pourrait, à terme, semer le trouble dans la stratégie de positionnement du groupe et ainsi menacer sa cotation sur les marchés financiers.