Le groupe biopharmaceutique mondial Ipsen s’est fixé des objectifs de croissance très ambitieux afin de maintenir sa capacité d’innovation dans les domaines de l’oncologie, des maladies rares et des neurosciences. Retour sur les moyens mis en place pour atteindre ce but avec Élise Alimondo, directrice du recrutement.
Élise Alimondo (Ipsen) : “Le recruteur est devenu un expert à part entière”
Décideurs RH. Quels sont les défis actuels pour Ipsen en matière de recrutement ?
Élise Alimondo. Le métier du recrutement a beaucoup évolué ces dernières années. Auparavant considéré comme un coordinateur administratif, le recruteur est devenu aujourd’hui un expert à part entière, qui anticipe les besoins et définit, en amont, les compétences requises pour répondre aux objectifs globaux de l’entreprise.
C’est particulièrement vrai chez Ipsen, où la fonction a été totalement internalisée afin de mieux répondre à nos enjeux dans un secteur d’activité en forte tension, au sein duquel les profils de haut niveau, capables de maîtriser des technologies en constante évolution, sont rares. Créé en 2018, le COE – Center of Expertise, ou Centre d’Excellence –, notre département en charge du recrutement, regroupe des équipes qui ont une connaissance pointue de nos métiers de la recherche et de l’innovation, et sont en capacité de réaliser des veilles concurrentielles très poussées, et d’identifier les leaders de demain.
L’arrivée de l’intelligence artificielle vient bousculer l’ensemble des méthodes de travail. Qu’en est-il de la fonction recrutement ?
Les données précises dont nous disposons grâce à notre système de suivi de candidature Workday concernant les volumes, les coûts, le temps de recrutement et les viviers de candidats nous ont permis de réaliser un audit pour identifier les facteurs qui entravent notre excellence opérationnelle, et sélectionner ainsi les outils d’IA les plus à même d’améliorer notre productivité. C’est le cas de LinkedIn, avec qui nous entretenons un partenariat global qui intègre des innovations IA et couvre l’ensemble de la chaîne de recrutement, de l’identification des talents jusqu’aux données du marché grâce au service Talent Insights. En outre, Paradoxe, que nous avons rebaptisé « Charlie », optimise la prise de rendez-vous avec les candidats, et dégage du temps pour des tâches à plus haute valeur ajoutée.
Nous déployons actuellement Copilot 365, qui nous permet entre autres d’intégrer nos 26 compétences clés dans toutes nos descriptions de poste afin d’améliorer l’évaluation des candidats en réduisant les biais. De plus, Copilot nous permettra d’optimiser d’autres aspects du processus de recrutement, avec de nombreux cas d’usage déjà identifiés, renforçant ainsi notre efficacité à chaque étape.
À une échelle plus globale, nous avons modélisé la prédiction du turnover au sein du groupe, ainsi qu’une analyse des compétences manquantes dans les métiers de demain, qui vient enrichir notre Strategic Workforce Planning.
“Le nombre de candidatures reçues double chaque année, et nous réduisons drastiquement la durée de nos processus de recrutement”
Nous n’avons toutefois pas souhaité investir pour l’instant dans un outil de triage des candidats par mots-clés, car nos activités requièrent des compétences particulièrement pointues et rares. Nos recruteurs continuent ainsi d’étudier soigneusement chaque candidature, en attendant l’arrivée de technologies plus performantes en la matière.
Les résultats obtenus sont-ils encourageants ?
Absolument ! Les outils sont là pour dégager du temps et ainsi améliorer la qualité de l’expérience candidat sur le plan humain. Nous priorisons une communication personnalisée et transparente à chaque étape du recrutement. Une démarche qui porte déjà ses fruits : nous constatons une nette progression de nos indicateurs de performance comme le taux de satisfaction – Net Promoter Score –, qui nous aide à constater les effets de notre travail. Nous nous réjouissons aussi de constater que le nombre de candidatures reçues double chaque année, et nous réduisons drastiquement la durée de nos processus de recrutement.
Quelles réflexions nourrissez-vous concernant l’usage grandissant des IA génératives au sein des entreprises ?
Nous sommes en pleine phase de discussion et d’expérimentation au sujet de l’intégration des IA génératives au sein des métiers RH. J’ai, dans ce cadre, la responsabilité d’un projet, mené à l’échelle du groupe, visant à définir les meilleurs usages et pratiques, en collaboration avec chaque métier des départements RH : acquisition et gestion des talents, Compensation & Benefits, mobilité internationale, etc.
Les candidats sont de plus en plus attentifs aux questions de diversité et d’inclusion. Comment sensibilisez-vous les équipes à ces enjeux, et par quels moyens les fédérez-vous ?
Les valeurs de diversité, d’équité et d’inclusion sont au cœur du modèle d’Ipsen, qui consiste à proposer des solutions thérapeutiques, à toutes et tous, partout dans le monde. La direction du groupe manifeste ses engagements en faveur de la diversité des parcours et des points de vue, que cela concerne le handicap, le genre, la diversité culturelle ou l’âge. Notre recrutement est le plus inclusif possible, grâce aux nombreuses formations proposées en la matière à l’ensemble des équipes, afin que chacun se sente engagé en faveur de la diversité.
Nous mettons par ailleurs en place des actions et programmes, comme le mécénat. Lors des Jeux olympiques de Paris, cinq athlètes paralympiques que nous avons soutenus ont eu l’occasion de présenter leur parcours aux collaborateurs du groupe, démontrant les valeurs clés d’Ipsen : la détermination, la passion et l’excellence dans l’exécution. Nous organisons également des Community Days, qui sont des journées d’actions de solidarité auprès d’associations.
Nous travaillons aussi étroitement avec les Employee ressource groups, créés à l’initiative des collaborateurs, et qui leur permettent, sur la base du volontariat, de se rassembler selon leurs intérêts communs : parmi eux se trouvent le groupe LGBTQI+ et le groupe À Tout Cœur pour les personnes touchées par le handicap.
Propos recueillis par Caroline de Senneville