Chantal Baudron figure parmi les grands noms de la chasse de têtes. Son cabinet éponyme est aujourd’hui l’un des plus influents de la place et fait figure de proue en luxe et mode. Première femme business angel de France, ses convictions l’emmènent à rencontrer de jeunes créateurs de start-up et à les accompagner dans leur développement. Aguerrie et profondément humaniste, elle embrasse un prisme large et complet de l’entrepreneuriat.
Chantal Baudron (Chantal Baudron SAS) : "Business angel, une affaire de rencontre"
Décideurs. Après un doctorat en psychologie appliquée à l’entreprise, vous avez choisi de vous tourner vers le recrutement. Pour quelles raisons ?
Chantal Baudron. Je suis tombée un peu par hasard dans le monde du recrutement. À mon époque, le secteur recherchait à recruter des psychologues. J’ai donc commencé à travailler chez Bernard Krief, pionner en France de la profession des consultants et du conseil en entreprise. J’y apprends les codes et gravis les échelons jusqu’à occuper, pendant quatre ans, le poste de directrice générale. J’ai par la suite eu envie de voler de mes propres ailes et de créer, en 1980, mon propre cabinet, mais dans les règles de l’art puisque je démarre de zéro : aucun client, consultant et dossier ne seront pris à la structure de Bernard Krief. J’étais très fière de respecter celui qui m’a formé au métier.
Et l’univers du luxe ?
J’ai d’abord fait le choix de ne pas me spécialiser et d’avoir plusieurs cordes à mon arc : mode, luxe, cosmétique, retail, santé, numérique, industrie, éducation. Très vite, j’y développe la practice luxe. De nombreux clients font appel à mes services et cela m’ouvre les portes d’un secteur dans lequel j’avais encore tout à apprendre. Très rapidement, j’ai dû décrypter un univers dont je ne savais rien. Recruter des profils que je ne connaissais pas a constitué un véritable challenge. C’est un secteur très sélectif puisqu’il n’a de spécificité qu’autour des produits ou des marchés. Pour être considéré, il faut être à proximité de cet univers.
Vous êtes la première femme business angel de France. Qu’est-ce qui vous a séduit ?
Je suis venue à l’activité de business angel il y a une quinzaine d’années après avoir gagné de l’argent. Jusque-là, je le gérais en placements financiers, mais à force de côtoyer des entrepreneurs, je me suis rendu compte qu’il serait mieux utilisé si je leur donnais un petit coup de pouce. J’ai eu un véritable coup de cœur. J’aime beaucoup les entrepreneurs. Lancer une entreprise est très courageux et ces jeunes font de nombreux sacrifices, ne comptent pas leurs horaires et font face à de fortes angoisses. Je n’investis que si je comprends le produit et privilégie plutôt les phases d’amorçage, lorsque la start-up vient de lever des fonds et qu’elle n’a pas encore réalisé de chiffre d’affaires.
Que retenez-vous de cette expérience ?
Beaucoup de points positifs, dont la stimulation intellectuelle. Ces entrepreneurs me donnent de l’énergie par leur créativité et nos discussions. Il m’arrive souvent de reconnaître dans ces jeunes le courage, la détermination et la patience dont je faisais preuve à leur âge. Leur enthousiasme débordant me permet de naviguer dans des secteurs d’activité très différents, même si cela reste en lien avec ma profession. C’est donc sur le critère d’évaluation que je base la plupart de mes investissements, une fois que je suis convaincue par le modèle de l’entreprise. Je n’ai pas de stratégie particulière, je crois beaucoup en mon intuition et je souhaite que cela reste une affaire de rencontre.
Propos recueillis par Alexis Ellin