Malgré l’adoption de multiples réformes législatives, le revenu annuel des femmes reste largement inférieur à celui des hommes. Emmanuel Macron s’engage à faire de ce combat une « cause nationale » en dépit des coupes budgétaires.

Le lundi 24 octobre 2016, l’Islande se retrouve au cœur de l’actualité lorsque des dizaines de milliers de femmes cessent subitement le travail pour protester contre les inégalités de salaires entre hommes et femmes. La symbolique est forte : une grande partie des bureaux islandais se vident à 14h38, heure à partir de laquelle une femme devrait s’arrêter de travailler au regard de sa rémunération annuelle par rapport à un homme. Une mobilisation générale largement relayée par les médias et qui trouve un écho dans toute l’Europe. L’initiative sera donc reproduite le 7 novembre en France à l’appel du collectif féministe Les Glorieuses.

L’Oréal, leader mondial de l’égalité de traitement

Sujet défrayant la chronique depuis plusieurs décennies, le problème de l’inégalité salariale homme-femme n’est toujours pas résolu. Selon un récent rapport de l’organisation Equileap, la France se place à la huitième position d’un classement inédit des sociétés favorisant le plus l’égalité homme-femme dans le monde. La Norvège, suivie par la Suède, les Pays-Bas et la Finlande, forment le quatuor de tête. L’étude porte sur un peu plus de 3 000 sociétés dont la capitalisation boursière individuelle dépasse deux milliards de dollars dans 23 pays développés. Dix entreprises françaises sont ainsi présentes dans les cinquante premières. Le géant des cosmétiques L’Oréal figure en tête de ce classement mondial. Sodexo se hisse à la 4e place et la Société générale à la 14e place. L’Oréal se classe également parmi les entreprises qui pratiquent le moins d’écart de salaire (de plus ou moins 3 %) entre les hommes et les femmes. Des données qui traduisent une nette amélioration vers l’équité salariale mais qui ne se reflète pas encore au niveau national.  

Des facteurs d’inégalités multiples  

Malgré l’adoption de réformes législatives, l’Insee estime que le revenu salarial des femmes reste inférieur de 24 % à celui des hommes en 2014 (27 % en 1995). Une différence qui reste très marquée parmi les cadres et les hauts revenus. D’ailleurs, le méta-moteur de recherche d’emploi Adzuna a publié au début de l’année 2017 une infographie révélatrice : en France, le salaire moyen d’une femme serait de 1 962 euros, quand celui d’un homme s’élèverait à 2 410 euros. Cet écart important ne dit cependant pas tout et doit être mis en relation avec d’autres indicateurs. « Il existe un très grand nombre de facteurs à l’origine de ces inégalités, la prédominance du temps partiel, les effets de secteurs et de statut, le fait que les femmes soient plus présentes dans les métiers les moins rémunérateurs, qu’elles aient des carrières plus morcelées », souligne Brigitte Grésy, secrétaire générale du Conseil supérieur de l’égalité professionnelle entre les hommes et les femmes.

L’Insee relève ainsi que 44,8 % des emplois féminins sont concentrés dans quelques secteurs peu rémunérateurs, comme l’administration publique, la santé, l’enseignement ou l’action sociale. Ces inégalités sont d’autant plus flagrantes que 31,3 % des femmes de 25 à 34 ans ont un diplôme supérieur à bac + 3, contre seulement 26,4 % des hommes. Les femmes éprouvent également plus de difficultés à accéder à des postes à responsabilités. À ce jour, la France ne compte que 39 % de femmes cadres. Augmenter « les bas salaires » ne suffit donc pas.

Des initiatives législatives européennes

La question d’une rémunération équitable semble toutefois évoluer. En avril 2017, le gouvernement islandais a annoncé l’adoption d’un projet loi contraignant les entreprises à viser l’égalité salariale homme-femme. L’État s’est posé pour objectif d’avoir mis fin aux inégalités d’ici 2022. Cette loi, qui entrera en vigueur en 2018, fait de l’Islande le premier pays à obliger les structures de plus de 25 salariés à prouver qu’elles versent un salaire égal à leurs employés, quel que soit leur sexe. À défaut, elles seront sanctionnées d’une amende. Outre-Manche, les sociétés de plus de 250 salariés devront publier les salaires moyens des hommes et des femmes, ainsi que la répartition des sexes par niveau de salaire. En revanche, aucune sanction n’est encore prévue pour les entreprises qui s’abstiennent de publier ces données.

Côté français, depuis la promulgation de l’ambitieuse « loi pour l’égalité réelle entre les hommes et les femmes », les conseils d’administration des grands groupes, déjà poussés à agir par la loi Copé-Zimmermann de 2011, se féminisent. Mais face aux manquements à l’obligation de négocier un accord d’égalité au-delà de 50 salariés, les premières amendes sont tombées en 2013. Le montant de la pénalité est fixé au maximum à 1 % des rémunérations et gains au sens de l’article L. 242-1 du code de la sécurité sociale. Il est déterminé par le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi, en fonction des mesures prises par la société en matière d’égalité professionnelle et des motifs indépendants de la volonté de l’employeur. ­

En avril 2017, Emmanuel Macron promettait de faire de l’égalité homme-femme « la cause nationale »  en installant un ministère des Droits des femmes « plein et entier ». C’est finalement un secrétariat d’État en charge de l’égalité entre les femmes et les hommes au budget réduit qui voit le jour, sous la direction de Marlène Schiappa. Le combat se poursuit, puisque l’une de ses priorités reste la promotion de l’égalité professionnelle.

Amandine Mujinga

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