Marie-Bernard Delom (Orange): «Les formations autour du savoir-être étaient jusque-là réservées aux managers »

Décideurs. Que pensez-vous de la mise en place du compte personnel d’activité (CPA) ?

Marie-Bernard Delom. C’est une bonne mesure. Dans ma vie privée, je m’occupe d’associations de chercheurs d’emploi et je suis convaincue de l’utilité du CPA pour ces populations, ainsi que pour les salariés des petites structures. Pour les plus grandes entreprises, dont Orange fait partie, c’est l’occasion de rendre visibles, auprès des femmes et des hommes du groupe, les grandes étapes de leur parcours. Même si nous avons déjà des outils de suivi semblables au CPA, son lancement nous a rappelé qu’il fallait aussi savoir « marketer » ces éléments ! Nous vivons une véritable accélération de l’innovation. La manière de distribuer et de vendre passe de plus en plus par le digital, il est donc impératif d’accompagner les salariés dans la maîtrise des compétences utiles de demain. Nous les assistons par des formations métier ainsi que par des formations autour du savoir-être, jusque-là réservées aux managers. Par exemple, l’apprentissage de l’innovation au quotidien, la communication avec impact ou encore l’écoute des collègues et des clients pour l’analyse de leurs besoins.

Pour revenir sur les formations managériales, comment les adapter aux mutations du travail ?

Tous les types de formation doivent être adaptés aux mutations du monde du travail. Nous devons tenir compte des transformations récentes du rapport au temps et à l’espace de travail. Mais évidemment, s’agissant des formations managériales, nous nous adaptons aux changements dans le rapport au pouvoir. Le numérique a modifié les relations de travail. Auparavant, le manager avait une fonction de « déployeur d’informations ». Aujourd’hui, ce n’est plus le cas, l’information circule sans lui. En revanche, il faut la traiter, lui donner du sens. Le manager est un peu l’« Yves Calvi » de son équipe : il anime le débat et « éditorialise » l’information. Plus que jamais, le manager doit accompagner personnellement chaque collaborateur et être, en même temps, garant du bien-être de son équipe. Son défi est désormais de créer ensemble du sens !

Vous disposez de plusieurs campus à l’étranger. Comment s’organisent la politique de formation au sein de ces campus et la gestion des différences culturelles ?

En 2011, nous avons installé quelques campus là où il y avait en permanence un nombre significatif de managers, mais depuis, dans une logique d’opportunité, de « remote », nous avons construit des sortes de « camps de base ». Par exemple, lorsqu’un objectif de développement a rassemblé assez de managers dans la zone Moyen-Orient, nous avons choisi d’installer un campus éphémère en Égypte avec des participants venus de toute la zone. S’agissant des différences culturelles, elles commencent souvent à la porte du bureau, de la division, du métier, sans avoir nécessairement besoin de passer une frontière. Nous assemblons des contenus totalement transverses au groupe avec d’autres adaptés aux contextes locaux, dans une forme de co-construction avec les pays. Et pour faciliter cet assemblage, nous disposons également d’outils digitaux, notamment d’un LMS permettant la diffusion de nos formations. Cent quinze mille de nos collaborateurs y ont aujourd’hui accès.

Propos recueillis par Marie-Hélène Brissot et Camille Guével