Fondateur et président d’Alixio, Raymond Soubie a annoncé le mois dernier le rachat d’Anveol. À 74 ans, il n’en finit pas de nourrir ses ambitions d’entrepreneur.
Raymond Soubie, une vie d’envies
« La connaissance du politique, je l’ai faite par pur hasard », affirme Raymond Soubie quand on l’interroge sur le début de sa carrière. Sorti de Sciences-Po et de l’ENA, il en a pourtant le profil type. Peu de temps après son diplôme, il intègre ainsi le cabinet du ministre du Travail de l’époque, Joseph Fontanet, qu’il suivra à l’Éducation nationale. En 1974, Jacques Chirac, Premier ministre, lui propose le poste de conseiller pour les affaires sociales et culturelles. Il accepte. Deux ans plus tard, lorsque Raymond Barre reprend les rênes de Matignon, il envisage sa reconversion, mais c’était sans compter sur la volonté du nouveau gouvernement de le garder. Il poursuit donc l’aventure. Devenu l’homme de confiance en matière sociale, Raymond Soubie est celui à qui l’on parle. Dirigeants, responsables patronaux et syndicaux l’ont adopté. « Je faisais partie des meubles », plaisante-t-il.
De l’administration à l’entrepreneuriat
On aurait pu l’appeler l’homme qui murmurait à l’oreille sociale des ministres encore longtemps. Pourtant, en 1981, la droite cède sa place à la gauche et le passionné troque son costume de conseiller du politique pour celui de patron de presse. Directeur du groupe Liaisons pendant dix ans, il ne s’attarde pas sur cette première expérience d’entreprise, ce qui fait vibrer le personnage est ailleurs.
1992. Raymond devient Soubie l’Entrepreneur en créant une structure dédiée à la presse professionnelle, puis à partir de 1997, au conseil en ressources humaines, Altedia. Il en fait le numéro un du secteur, si bien qu’en 2000 le cabinet est introduit en Bourse et en 2005 est racheté par le géant de l’intérim, Adecco. Pas de nostalgie quand il se sépare de ce qu’il a créé. Le bâtisseur ne se complaît pas à gérer des entreprises mais s’évertue à les développer. « À la différence de l’État, la prise de risque aboutit à des résultats que l’on peut observer presque immédiatement, et c’est un délice », déclare-t-il une lumière dans les yeux. Détecter de nouvelles idées, trouver les hommes pour incarner un projet, amener les métiers à changer, voilà le triptyque qui anime notre homme. Il affirme : « Choisir les bons thèmes et ne pas se tromper sur les gens sur lesquels vous pariez, c’est la clé. » Car l’ancien Monsieur Social de la République a le goût de la chose bien faite.
Les parenthèses inattendues
« Le rôle de conseiller du prince, je l’ai retrouvé par hasard, quand j’ai quitté la présidence d’Altedia », tente-t-il à nouveau. Lorsqu’il converse au téléphone avec un Nicolas Sarkozy devenu président de la République, ce dernier lui demande de l’accompagner sur l’amorce du quinquennat pour les grands sujets sociaux. Il devait y rester douze jours, il y travaillera trois ans. En effet, Raymond Soubie n’est pas quelqu’un qui demande, mais quelqu’un à qui l’on propose. Il nous confie que pour lui, le palais de l’Elysée était un « lieu d’observation inouï » qui lui aura permis de se faire une idée bien précise de ce qui ne fonctionne pas dans les hautes sphères ministérielles. « Dans les entreprises, le diable est dans les détails, pour l’État aussi », souligne-t-il. En 2010, une fois la réforme des retraites adoptée, tout le monde pensait que, le travail accompli, Raymond Soubie allait tirer sa révérence. Ce ne fut qu’un changement de cap. L’entrepreneur ressurgit et retourne à ses vieilles amours : le conseil stratégique RH. Sous la holding Arfilia, il développe la branche conseil avec Alixio dans le domaine du conseil RH et sa société sœur Taddeo, spécialisée en gestion de situation de crise, à cote d’AEF, agence d’information spécialisée. L’idée : aller là où les grands cabinets existants ne vont pas toujours, par exemple en amont des grandes transformations. Pari réussi jusque-là puisque la structure compte, trois ans plus tard, 220 consultants et réalise un chiffre d’affaires de 35 millions d’euros. Le chef d’entreprise entend développer Alixio, Taddeo et AEF de la même manière qu’il l’avait fait pour Altedia. Et lorsqu’on lui demande où il puise son inspiration, il répond très simplement : « Dans mes lectures et dans les rencontres. » Son livre de chevet ? Il n’en a pas. De la presse quotidienne aux essais philosophiques en passant par les romans classiques, il aime changer de registre. Et ce changement, il se l’applique au quotidien. « Je me dis que je ne me suis jamais ennuyé », nous confie-t-il apaisé. Il aime avoir l’impression permanente de rentrer chaque matin de vacances.
Raymond Soubie a tout du leader passionné. Il avoue : « J’ai toujours essayé d’avoir dans mes fonctions de dirigeant un vrai sens des responsabilités, tout suivre de près et faire confiance aux gens qui m’entourent. Je considère qu’avoir une autorité forte, être reconnu, permet de mieux déléguer. » Celui qui ne cache pas sa passion pour les arts et en particulier l’Opéra – il dirigea l’Opéra de Paris entre 1987 et 1989 – ajoute à ses fonctions celle de président du Théâtre des Champs-Elysées depuis plus de trente ans.
« La vie est faite de hasards et se vit au fil des envies. » Par ces mots, Raymond Soubie conclue l’entretien et se veut fidèle à l’image que lui attribue la presse depuis plusieurs années, celle d’un « maître Yoda », sage de la saga Star Wars.
Julie Atlan
De l’administration à l’entrepreneuriat
On aurait pu l’appeler l’homme qui murmurait à l’oreille sociale des ministres encore longtemps. Pourtant, en 1981, la droite cède sa place à la gauche et le passionné troque son costume de conseiller du politique pour celui de patron de presse. Directeur du groupe Liaisons pendant dix ans, il ne s’attarde pas sur cette première expérience d’entreprise, ce qui fait vibrer le personnage est ailleurs.
1992. Raymond devient Soubie l’Entrepreneur en créant une structure dédiée à la presse professionnelle, puis à partir de 1997, au conseil en ressources humaines, Altedia. Il en fait le numéro un du secteur, si bien qu’en 2000 le cabinet est introduit en Bourse et en 2005 est racheté par le géant de l’intérim, Adecco. Pas de nostalgie quand il se sépare de ce qu’il a créé. Le bâtisseur ne se complaît pas à gérer des entreprises mais s’évertue à les développer. « À la différence de l’État, la prise de risque aboutit à des résultats que l’on peut observer presque immédiatement, et c’est un délice », déclare-t-il une lumière dans les yeux. Détecter de nouvelles idées, trouver les hommes pour incarner un projet, amener les métiers à changer, voilà le triptyque qui anime notre homme. Il affirme : « Choisir les bons thèmes et ne pas se tromper sur les gens sur lesquels vous pariez, c’est la clé. » Car l’ancien Monsieur Social de la République a le goût de la chose bien faite.
Les parenthèses inattendues
« Le rôle de conseiller du prince, je l’ai retrouvé par hasard, quand j’ai quitté la présidence d’Altedia », tente-t-il à nouveau. Lorsqu’il converse au téléphone avec un Nicolas Sarkozy devenu président de la République, ce dernier lui demande de l’accompagner sur l’amorce du quinquennat pour les grands sujets sociaux. Il devait y rester douze jours, il y travaillera trois ans. En effet, Raymond Soubie n’est pas quelqu’un qui demande, mais quelqu’un à qui l’on propose. Il nous confie que pour lui, le palais de l’Elysée était un « lieu d’observation inouï » qui lui aura permis de se faire une idée bien précise de ce qui ne fonctionne pas dans les hautes sphères ministérielles. « Dans les entreprises, le diable est dans les détails, pour l’État aussi », souligne-t-il. En 2010, une fois la réforme des retraites adoptée, tout le monde pensait que, le travail accompli, Raymond Soubie allait tirer sa révérence. Ce ne fut qu’un changement de cap. L’entrepreneur ressurgit et retourne à ses vieilles amours : le conseil stratégique RH. Sous la holding Arfilia, il développe la branche conseil avec Alixio dans le domaine du conseil RH et sa société sœur Taddeo, spécialisée en gestion de situation de crise, à cote d’AEF, agence d’information spécialisée. L’idée : aller là où les grands cabinets existants ne vont pas toujours, par exemple en amont des grandes transformations. Pari réussi jusque-là puisque la structure compte, trois ans plus tard, 220 consultants et réalise un chiffre d’affaires de 35 millions d’euros. Le chef d’entreprise entend développer Alixio, Taddeo et AEF de la même manière qu’il l’avait fait pour Altedia. Et lorsqu’on lui demande où il puise son inspiration, il répond très simplement : « Dans mes lectures et dans les rencontres. » Son livre de chevet ? Il n’en a pas. De la presse quotidienne aux essais philosophiques en passant par les romans classiques, il aime changer de registre. Et ce changement, il se l’applique au quotidien. « Je me dis que je ne me suis jamais ennuyé », nous confie-t-il apaisé. Il aime avoir l’impression permanente de rentrer chaque matin de vacances.
Raymond Soubie a tout du leader passionné. Il avoue : « J’ai toujours essayé d’avoir dans mes fonctions de dirigeant un vrai sens des responsabilités, tout suivre de près et faire confiance aux gens qui m’entourent. Je considère qu’avoir une autorité forte, être reconnu, permet de mieux déléguer. » Celui qui ne cache pas sa passion pour les arts et en particulier l’Opéra – il dirigea l’Opéra de Paris entre 1987 et 1989 – ajoute à ses fonctions celle de président du Théâtre des Champs-Elysées depuis plus de trente ans.
« La vie est faite de hasards et se vit au fil des envies. » Par ces mots, Raymond Soubie conclue l’entretien et se veut fidèle à l’image que lui attribue la presse depuis plusieurs années, celle d’un « maître Yoda », sage de la saga Star Wars.
Julie Atlan