Emmanuel Macron, le Grand Soir
Le discours, préalablement enregistré, devait avoir lieu il y a plus d’une semaine. L’incendie de Notre-Dame, l’arrêt qu’il a imposé dans l’agenda gouvernemental et les fuites qu’il aura occasionnées dans l’allocution présidentielle en ont voulu autrement.
C’est donc dans le cadre inédit d’une conférence de presse, la première de son quinquennat, que le Président Macron s’est adressé jeudi 25 avril aux Français, pour répondre aux attentes exprimées au cours du grand débat. À 18 heures précises, devant un parterre de journalistes triés sur le volet, le chef de l’État a pris la parole. Déployant les grands axes d’une « nécessaire transformation » : refonte démocratique, travail et formation, revalorisation des « permanences du projet français »… Il s’est dit conscient de certaines erreurs passées et de leur part de responsabilité dans des « colères justifiées » et déterminé à « replacer l’humain » au cœur de son projet pour la France.
« J’assume »
« Beaucoup a été fait sur ces deux dernières années, mais beaucoup de choses ne se voient pas tout de suite… On est un pays où l’on attend énormément, parfois trop, du chef de l’État », a déclaré le président qui a reconnu ne pas avoir toujours eu « conscience de cette attente qui a provoqué une certaine colère ». Tout comme sa tendance passée à faire trop vite et trop seul… « Quand on n’explique pas suffisamment, qu’on n’associe pas suffisamment, même si on prend les bonnes décisions, a-t-il admis, elles sont perçues comme ayant été imposées. » « Diriger en démocratie, c’est accepter de ne pas être populaire et je préfère être responsable, tenir mes engagements et prendre les décisions que je crois bonnes et être impopulaire plutôt que de chercher à plaire de façon éphémère. Donc j’assume », a déclaré Emmanuel Macron qui s’est dit « transformé » par l’exercice du grand débat et les enseignements qui en ont découlé.
« Nouvelle méthode »
« Cette période m’a changé, elle a accru mon sentiment d’immense responsabilité, la conviction que je n’aurai jamais de répit parce qu’il y a tant d’attente… », a affirmé le président de la République avant de poursuivre : « Ce que je veux aujourd’hui, c’est faire comprendre aux Français que j’ai compris, senti dans ma chair ce qu’ils vivent. » Le sentiment d’injustice sociale, fiscale, territoriale, le sentiment de souffrir d’un manque de considération, le manque de confiance envers les élites, « toutes les élites… » , le sentiment d’abandon, la peur « des grands changements » : le déclassement social et la dépendance, l’immigration et l’urgence écologique…
"Quand on n'explique pas suffisamment, qu'on n'associe pas suffisamment, même si on prend les bonnes décisions, elles sont perçues comme ayant été imposées"
Pour le Président, l’heure n’est pas au virage de fond, mais à l’intensification des orientations amorcées et au changement de forme. « Les transformations en cours ne doivent pas être arrêtées. Elles n’ont pas été assez rapides, radicales et humaines mais elles sont justes à bien des égards. » D’ailleurs, a-t-il souligné, les résultats sont là : les investissements repartent, des emplois se créent et notre croissance est désormais supérieure à certains pays voisins… « La solution n’est donc pas dans le reniement », a-t-il estimé, mais dans la nécessité d’aller plus loin et dans celle « de remettre l’humain au cœur du projet, de l’enraciner… ».
« Angles morts »
« C’est la nouvelle méthode que je veux déployer pour répondre à la part d’énervement née de malentendus », a déclaré le chef de l’État. C’est aussi la méthode qui permettra d’apporter une réponse juste et efficaces aux « angles morts » de la société révélés par le grand débat : les familles monoparentales, les actifs qui travaillent dans les villes sans avoir les moyens d’y vivre, les enfants handicapés, les retraités aux revenus insuffisants… toutes ces populations pour qui les politiques publiques, le Président l’a reconnu, sont insuffisantes quant elles ne sont pas inexistantes. Ces populations dont il entend regagner la confiance… « Chaque centimètre qu’on aura reconquis sera un centimètre de bonheur civique et républicain repris », a déclaré Emmanuel Macron.
Caroline Castets