Décideurs. Afin de favoriser la transmission d’entreprise, vous créez en 2003 un dispositif qui porte aujourd’hui votre nom, le « Pacte Dutreil ». Quels étaient les objectifs de cette réforme?

Renaud Dutreil.  À l’époque, la fiscalité sur la transmission d’entreprise était confiscatoire et se traduisait par le transfert de belles entreprises patrimoniales à des entreprises étrangères. Il apparaissait clairement que le produit de cette lourde taxation était illusoire en comparaison des dommages causés par le transfert à l’étranger des centres de décision liés au changement de propriétaire. Délocalisation d’emplois, démembrement d’entreprises, disparition des fonctions les plus créatrices de valeur, perte de lien avec le territoire, etc. Une fois de plus, une fiscalité trop lourde se traduisait par une atteinte directe à nos intérêts nationaux. J’ai voulu mettre un coup d’arrêt à cette étreinte destructrice, au moment où toute une génération d’entrepreneurs s’apprêtait à passer la main.

 

Décideurs. Ce dispositif est encore aujourd’hui l’un des outils juridiques et fiscaux les plus performants en matière de transmission d’entreprise. Vous attendiez-vous à une telle réussite?

R.D. Oui, parce que j’ai élaboré cette mesure avec des esprits avertis, par exemple maître Monassier ou Yvon Gattaz, qui savaient de quoi ils parlaient, en dialoguant avec des entreprises emblématiques de cette problématique fiscale, comme dans la vallée de l’Arve, cette ruche savoyarde de PME industrielles, plutôt qu’en suivant les recommandations de stratèges budgétaires ou politiques qui n’avaient jamais mis le pied dans une usine plus de cinq minutes. Au lieu de proposer vingt-cinq mesurettes sur la transmission d’entreprise, satisfaisant vingt-cinq lobbies, j’en proposais une seule! Imaginez le choc! Francis Mer m’a appuyé. Il a compris la logique. Je lui en sais gré. J’ai aussi été très heureux de voir que François Hollande, contre l’avis du PS, avait conservé cet outil. Il faut cependant être vigilant. Beaucoup en France, par pure idéologie ou famine budgétaire, songent à un retour en arrière.

 

Propos recueillis par Aurélien Florin

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