Le code de la propriété intellectuelle confère au titulaire d’un brevet un monopole d’exploitation de l’invention couverte par le brevet. Ce monopole constitue un droit d’interdire l’exploitation de cette invention par des tiers, et non un droit d’exploiter cette invention. Cette différence est primordiale.

La délivrance d’un brevet n’engendre pas automatiquement une liberté d’exploitation pour le titulaire : le droit exclusif détenu par le titulaire d’un brevet est un droit d’interdire et pas un droit de faire.

Un droit exclusif : le droit d’interdire

Pour exploiter une invention protégée par un brevet, il faut nécessairement avoir obtenu l’autorisation de son titulaire. Autrement dit, le titulaire peut autoriser ou interdire les tiers d’exploiter l’invention pour laquelle il a obtenu son brevet.

Le droit d’interdire s’applique pour l’ensemble des actes constitutifs d’une exploitation. Mentionnés aux articles L.613-3 et L.613-4 du code de propriété intellectuelle, on y trouve par exemple la production, la vente, la distribution mais également le stockage et la livraison de l’invention brevetée.

Ce droit d’interdire l’exploitation d’une invention est spécifique aux brevets. Ce droit peut bien sûr être complété par une protection de la marque sous laquelle le produit est commercialisé, ainsi que par une protection par dessins et modèles, par exemple de la forme esthétique du produit ou de son emballage.

Un droit d’interdire ne confère pas automatiquement un droit d’exploiter : l’importance de l’étude de liberté d’exploitation.

Ne pas confondre brevetabilité et liberté d’exploitation

Être titulaire d’un brevet ne signifie jamais être libre d’exploiter l’invention protégée par ce brevet. La délivrance d’un brevet n’implique pas une liberté d’exploitation.

Ainsi il convient de distinguer deux types d’études relatives à une invention : l’étude de brevetabilité et l’étude de liberté d’exploitation. La première, l’étude de brevetabilité, permet de déterminer les chances d’obtenir un brevet. La seconde, l’étude de liberté d’exploitation, permet de vérifier si l’exploitation de l’invention est libre de droits.

« Être titulaire d’un brevet ne signifie jamais être libre d’exploiter l’invention protégée par ce brevet »

Lorsque nos clients développent un nouveau produit, ils nous sollicitent fréquemment pour effectuer une recherche d’antériorités parmi les brevets existants. Il peut toutefois y avoir méprise sur l’objectif recherché. En effet, la confusion entre la liberté d’exploitation et la brevetabilité apparaît souvent dans nos échanges.

• Dans certains cas, le principal objectif du client est de s’assurer qu’il est libre de mettre son produit sur le marché sans courir le risque de contrefaire les brevets de concurrents. La question de la brevetabilité, c’est-à-dire : "Est-ce que je peux obtenir une protection pour mon invention ?", n’est alors que secondaire.

Objectif principal : La liberté d’exploitation.

• Dans d’autres cas, le principal objectif du client est de déterminer s’il peut protéger son invention par un brevet et ainsi obtenir un monopole d’exploitation de cette invention.

Objectif principal : La brevetabilité.

Lorsque l’objectif principal est la brevetabilité, il n’est pas toujours facile de faire comprendre à nos interlocuteurs que l’on peut breveter valablement une solution technique, mais ne pas être en mesure de la mettre librement sur le marché.

De plus en plus de produits sont dits "complexes", ils sont composés d’ingrédients ou composants ou pièces multiples. Même si vous détenez un brevet sur le produit entier, certains ingrédients, composants ou pièces peuvent être protégées par des brevets détenus par des tiers qui peuvent être des concurrents. Le téléphone portable en est la parfaite illustration. Il est alors nécessaire de recueillir l’autorisation des différents titulaires de brevets sur les différents composants de l’invention pour exploiter votre produit couvert par votre brevet.

Ce cas se rencontre également en présence d’un brevet de perfectionnement : l’exploitation du perfectionnement d’une invention protégée par un brevet d’un tiers constitue un acte de contrefaçon, en l’absence d’accord du tiers.

Brevet de perfectionnement : attention à la contrefaçon

Selon la jurisprudence, on parle de perfectionnement dès lors qu’une "invention nouvelle se rattache techniquement au brevet d’origine". Prenons un exemple : imaginons le cas d’une société W qui posséderait un brevet B1 en vigueur protégeant le principe d’un barbecue en forme de sphère coupée en deux dont la partie supérieure forme un couvercle amovible muni d’une poignée.

Imaginons maintenant que notre client, la société X a développé un perfectionnement brevetable à ce modèle de barbecue, par exemple sous la forme d’une charnière qui relie le couvercle à la cuve pour en permettre une manipulation plus facile :

Objectif Brevetabilité : La recherche effectuée aboutit à un avis positif. Il est possible pour la société X d’obtenir un brevet B2 valable protégeant le mécanisme de charnière.

Objectif Liberté d’exploitation : La recherche effectuée aboutit à un avis négatif. La mise sur le marché par la société X d’un barbecue équipé du mécanisme de charnière contrefait le brevet B1. Le titulaire W du brevet B1 est en droit d’interdire la commercialisation du barbecue à charnière.

Par conséquent, pour analyser un nouveau produit, il ne suffit pas de vérifier qu’il soit brevetable, il faut aussi s’assurer qu’il ne soit pas contrefacteur d’un brevet concurrent.

L’étude de liberté d’exploitation (ou "libex" ou "FTO study") permet donc de cartographier les brevets, en lien avec votre invention, afin de vérifier si votre invention dépend d’un ou de plusieurs brevets détenus par un tiers et potentiellement concurrent. En exploitant un dispositif que vous avez inventé et protégé par un brevet, vous êtes potentiellement contrefacteur si ce dispositif comporte un élément protégé par un brevet d’un tiers.

En fonction de l’objectif recherché, la recherche d’antériorités ne sera pas réalisée de la même manière. Pour la liberté d’exploitation, on s’intéressera principalement aux brevets en vigueur alors que, pour la brevetabilité, tout document public peut constituer une antériorité valable, y compris un brevet qui n’est plus en vigueur.

Novagraaf accompagne très régulièrement ses clients pour réaliser les études de liberté d’exploitation nécessaires avant toute commercialisation d’un produit, dans l’objectif d’évaluer les risques et de permettre une exploitation paisible, sans enfreindre un droit détenu par un tiers.

Les équipes de Novagraaf sont sensibilisées à ces questions et proposent de vous accompagner tout au long du développement de vos produits afin de vous permettre d’agir librement et en position de force sur le marché.

SUR LES AUTEURS

Vincent Robert, Directeur du département Physique-Mécanique, Conseil en Propriété Industrielle - Brevets, et Audrey Firminhac-Blanchard, Juriste, chez Novagraaf, France.

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Vincent Robert

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