Oui, le secteur de la banque au service des indépendants peut être disrupté. La preuve avec la success story de Qonto qui concurrence les poids-lourds du secteur. Alexandre Prot, fondateur du groupe revient sur une aventure menée tambour battant.

Décideurs. Pourquoi avoir fondé Qonto ?

Alexandre Prot. Il y a quatre ans, avec Steve Anavi, nous nous sommes lancé le défi de réinventer les services financiers et la banque. Nous avions déjà monté une première entreprise entre 2013 et 2016 dans un domaine différent. Nous connaissions l’enfer que vivent les entrepreneurs et les patrons de TPE/PME dans la gestion de leurs finances, de leur comptabilité et de toutes les tâches administratives. Leur coût en termes de temps, de charge mentale et d’argent génère de véritables frustrations. Quand notre société a été rachetée, nous nous sommes basés sur notre propre expérience ainsi que sur plus d’une centaine d’entretiens avec des indépendants, des artisans et des dirigeants de PME pour mettre en place notre nouveau projet.

En quoi êtes-vous novateurs ?

Nous nous adressons à des clients qui ont déjà des comptes ou à des entreprises qui voient le jour. En France, il y a plus de créations d’entreprises que de naissances. Ce qui donne une idée de la vitalité du marché. Notre cocktail pour attirer les clients est très simple : un super produit. On peut ouvrir facilement un compte en ligne, effectuer des transactions en temps réel, etc. Par exemple, à partir d’une photo, le logiciel peut extraire le montant de la TVA d’une facture de restaurant, simplifiant le travail de comptabilité. Nous avons également un service client très réactif, disponible sept jours sur sept. Enfin, nous proposons des tarifs transparents avec des forfaits à partir de 9 euros par mois, sans engagement.

Quelle était votre logique de recrutement ?

Nous avons volontairement constitué une équipe de non-experts bancaires. Notre force repose sur le fait de réinventer les services financiers. Nos premiers salariés étaient surtout des designers et des développeurs qui ne connaissaient pas cet univers. Aujourd’hui notre taille et notre agrément d’établissement de paiement nécessitent de traiter des sujets réglementaires spécifiques mais, sur toute la partie produit, support, pricing, nous cassons les codes existants.

"Nous avons volontairement constitué une équipe de non-experts bancaire"

Parlez-nous de votre culture d’entreprise...

Celle-ci est un vrai sujet, surtout quand on se développe aussi rapidement dans une période où nous ne sommes pas tous physiquement au même endroit. Nous portons quatre valeurs : l’ambition, le travail d’équipe, la maîtrise et l’intégrité. Pour ce qui est de l’ambition, nous visons les 500 000 clients d’ici à 2023, contre 150 000 aujourd’hui ; ainsi qu’un net promoter score (indicateur de satisfaction et de fidélité, ndlr) de 75, contre un peu moins de 70 actuellement, sachant que les banques traditionnelles, elles, sont proches de 0. Le travail en équipe et la notion de tempo sont également centraux. Les différents départements doivent œuvrer au même rythme pour sortir le meilleur produit, le plus rapidement possible.

La question du développement personnel est également centrale...

Tout à fait. Nous le plaçons au coeur de l’entreprise. En s’assurant que nos collaborateurs grandissent, on garantit le meilleur service pour nos clients. Nous sommes actuellement 300 et pourrions être 450 d’ici à la fin de l’année. Pour arriver à déployer à plus grande échelle notre modèle, il faut que chacun s’améliore.

Ce qui est également votre cas ?

Je n’ai jamais fait ce que je suis en train d’accomplir. J’apprends tous les jours. Je dois sans cesse m’améliorer et, si possible, grandir un peu plus vite que l’entreprise. Il me faut aussi rester proche des équipes et des clients, m’intéresser à leur quotidien, tout en regardant relativement loin pour prendre les bonnes décisions et être là où l’on veut d’ici cinq ou dix ans. Par exemple, je passe une heure par semaine à regarder les tickets envoyés à notre service client. Mais je réfléchis aussi à des questions de long terme, comme le télétravail dans la durée.

Propos recueillis par Olivia Vignaud

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