La start-up, qui exploite la chaleur des data centers, bouclait en février dernier son troisième tour de table. Cette levée de fonds va lui permettre de démarcher de nouveaux clients et de préserver son avance technologique.

Sur le fil. En février, avant que les vannes de financement ne se tarissent en prévision du confinement, Qarnot Computing levait 6 millions d’euros. Pour son troisième tour de table, la start-up - dont l’activité consiste à récupérer la chaleur des serveurs informatiques pour chauffer écologiquement des bâtiments et de l’eau - accueille à son capital la Banque des Territoires (CDC), Engie Rassembleurs d’Énergies, A/O Proptech et le groupe Casino.

Un radiateur ordinateur

L’aventure démarre il y a presque dix ans déjà. À cette époque, Paul Benoit, fondateur de Qarnot, dresse le constat suivant : « On utilise de plus en plus de serveurs informatiques, qui dégagent de la chaleur. Ceux-ci sont hébergés dans des datas centers qui nécessitent beaucoup d’énergie pour fonctionner. » Fort d’une expérience en informatique, ce diplômé en ingénierie liste les besoins logistiques nécessaires au fonctionnement des serveurs : de l’espace, de l’électricité, du réseau et du froid... ou des personnes prêtes à récupérer cette chaleur.

C’est ainsi qu’est né le radiateur numérique de Qarnot. Placés à l’intérieur de celui-ci, les ordinateurs travaillent à distance pour les entreprises dont les besoins en calculs s’avèrent importants. L’objet est capable de restituer la chaleur produite, tout en restant silencieux. Les clients de Qarnot : pour le moment essentiellement des banques et des studio d’animation. Ces radiateurs, dotés d’un thermostat, équipent aujourd’hui environ un millier de logements sociaux (hors pièces humides).

Une chaudière numérique

Cette première idée a pu être déployée grâce à une première levée de fonds de 2 millions d’euros en 2014. Deux ans plus tard, un deuxième tour de table a permis à Qarnot de sécuriser 2,5 millions supplémentaires. Depuis, la start-up s’est lancée dans les chaudières numériques. Le principe est toujours le même : en circulant dans le système, l’eau se charge des calories du calcul informatique. « Les chaudières peuvent fournir la majeure partie de la production d’eau chaude. Pour les pics de besoins, comme en hiver, nous envisageons des solutions hybrides avec des partenaires, comme le gaz », poursuit Paul Benoit. Inaugurées l’an dernier, une centaine d’entre elles devraient être installées cette année. Ces chaudières, qui permettent de diviser l’empreinte carbone par quatre par rapport aux appareils électriques, intéressent la France mais aussi un pays comme la Finlande.

En décembre 2018, Qarnot et Casino dévoilaient également une coentreprise baptisée ScaleMax, destinée à installer des data centers dans des entrepôts ainsi que des magasins et visant à y produire de l’énergie. « Nous travaillons avec le groupe Casino depuis deux ans et équipons leurs entrepôts, mais nous avons vocation à nous développer à plus grande échelle », rapporte Paul Benoit.

Le chiffre d’affaires de Qarnot double depuis deux ans et devrait atteindre les 3 millions d’euros pour 2019. Grâce à sa nouvelle levée de fonds, la start-up souhaite conserver son avance technologique mais aussi démarcher de nouveaux clients, comme les biotech, les entreprises d’intelligence artificielle, l’industrie automobile ou encore aéronautique. « Nous avons développé une plateforme universelle mais chaque interlocuteur a des besoins spécifiques et nous nous devons de connaître leur secteur. » L’équipe de 35 personnes va rapidement grossir puisqu’une vingtaine de recrutements sont prévus d’ici à la fin de l’année. La force de Qarnot : « Assurer la souveraineté des données, réduire l’empreinte carbone et proposer des solutions économiques. » Des sujets brûlants en cette période de crise.

Olivia Vignaud

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