Le BCG et le Mouvement Impact France ont mené la deuxième édition de leur étude consacrée au développement des start-up qui placent la recherche d’impact positif au cœur de leur modèle. Focus de cette année : le coût que ces entreprises évitent à la société.
Licornes à impact, pour une nouvelle mise en valeur
Ces dernières années, l’apparition de vingt-neuf licornes françaises dans les secteurs de la fintech, du big data ou encore de la blockchain, a été facilitée par un volontarisme politique fort, traduit par des investissements importants dans l’innovation technologique et scientifique. Aujourd’hui, la multiplication des crises écologiques et sociales et les engagements croissants pris par la France pour y répondre, imposent de porter ces mêmes efforts vers l’émergence de champions de la transition.
Comment favoriser cette éclosion ? Pour Jérôme Schatzman, directeur du Centre d’innovation sociale et écologique de l’Essec, qui a participé à cette étude : "Tant que l’on ne prendra pas réellement en compte l’impact des entreprises sociales, en allant jusqu’à une valorisation monétaire, au moins partielle, de cet impact, on ne créera pas les vraies conditions de leur changement d’échelle. On passera à côté de solutions pourtant efficaces pour faire face aux défis sociaux et environnementaux
de notre époque."
"L'indicateur des coûts évités amorce un changement de paradigme"
Indicateurs
Pour créer les conditions de ce basculement, l’étude propose de revisiter la définition en vigueur de la licorne – innovation de rupture, moins de dix ans, un milliard de dollars de valorisation financière – en substituant au critère de valorisation financière celui des coûts que les entreprises à impact évitent à la société, ramenés en euros : par exemple les coûts épargnés en évitant l’émission de tonnes de CO2, en reconduisant à l’emploi une personne au chômage, etc. Pour illustrer cette nouvelle grille de lecture, l’étude analyse un panel de onze start-up à impact.
En moyenne, ces dernières permettent d’éviter à la société des coûts équivalents à 30 % de leur chiffre d’affaires. Si ces coûts évités étaient pris en charge par l’État et ajoutés au chiffre d’affaires de ces entreprises, leur résultat net deviendrait de fait largement positif. Alors que dans la vision comptable actuelle, elles ont une profitabilité faible, voire négative pour certaines, ce qui freine leur développement et entrave leur attractivité auprès des investisseurs.
New deal
"L’indicateur des coûts évités amorce un changement de paradigme. Il nous permet de quantifier concrètement la valeur ajoutée de ces entreprises pour la société, en les évaluant sur le cœur de leur raison d’être : l’impact environnemental et social", estime Quentin Decouvelaere, directeur associé au BCG et coauteur de l’étude. "À l’image de ce qui a été déployé pour la French Tech, il est temps que nous donnions à ces acteurs engagés la capacité de passer à l’échelle et d’atteindre rapidement l’hypercroissance pour décupler leur impact écologique et social pour la société", ajoute Caroline Neyron, DG du Mouvement Impact France qui formule trois propositions pour libérer le potentiel des entreprises à impact et faciliter leur développement : mise en place d’un programme "Next Impact" par la French Tech, fléchage ciblé vers les start-up à impact d’une partie des fonds de France 2030 et instauration du statut de "Jeune entreprise à impact" permettant l’octroi d’un crédit d’impôt sur leurs cotisations sociales adossé au montant annuel des coûts évités permis par leur activité. Objectif fixé : dix licornes à impact parmi les cent licornes attendues d’ici à 2030.
Antoine Morlighem