David Lisnard, l’ambitieux
C'est avant tout sa fidélité à François Baroin, ancien président de l'association des maires de France et mentor, que le maire de Cannes a souhaité rappeler à l'occasion de son discours d'investiture, avant d'annoncer que son mandat serait placé sous le signe de la défense de la municipalité.
Issu d’une famille de sportifs dont l’implantation dans la ville de Cannes remonte à plusieurs générations, David Lisnard a suivi des études supérieures au sein de l’Institut d’études politiques de Bordeaux. Libéral, chiraquien, l’homme qui prend aujourd’hui la tête de l’Association des maires de France affiche une certaine ressemblance avec son prédécesseur, François Baroin, s’en distinguant probablement par de plus grandes ambitions. Il ne s’en cache pas, le poste pourrait lui servir de tremplin pour une élection présidentielle future. Son engagement politique s’inscrit dans la durée : directeur de cabinet et attaché parlementaire entre 1996 et 1999 de Jacques Pélissard – son mentor, lui aussi président de l’AMF en son temps – il devient adjoint au maire de la Croisette en 2001. Son ascension se poursuit en 2014 lorsqu’il prend la tête de ladite mairie, et prend une ampleur nationale en 2017 en devenant le porte-parole de François Fillon.
L’État, c’est nous
L’homme cultive sur Twitter la démonstration de son action publique et l’amour des belles lettres, citant à l’envi Montesquieu, Tocqueville ou encore Dostoïevski. Personnage d’action durant la crise sanitaire, ses initiatives ont pu sembler parfois abracadabrantesques, comme lorsqu’il décide de faire désinfecter les plages de Cannes. Ce qui se joue à présent avec son élection à la tête de la liste "Union soutenue par François Baroin" est annonciateur du renouvellement du duel qui va opposer Emmanuel Macron à la droite républicaine. Il l’assume, l’AMF sera, sous sa présidence, une association dynamique, indépendante, pluraliste, cherchant à représenter les territoires et à défendre le local face à une présidence jupitérienne, parfois oublieuse des communes. Cherchant à pousser la Macronie dans le piège de Thucydide, David Lisnard a développé sa volonté décentralisatrice lors de son allocution. La couleur est annoncée, "la loyauté n’existe que dans la liberté et non pas dans la vassalité".
Destruction créatrice
Le discours ne peut cependant se réduire au bras de fer annoncé avec la majorité présidentielle, le Cannois voulant inscrire son mandat dans l’action. "La crise, c’est ce pour quoi a été inventé la politique […], depuis que l’on sait que l’homme est un loup pour l’homme." Voyant dans les tumultes des tensions sociales et sanitaires des cinq dernières années le cycle d’une destruction créatrice, il a présenté trois propositions au chef de l’État : une plus forte territorialisation des politiques de santé, un décloisonnement des offres sanitaires, ainsi qu’une politique ambitieuse pour le grand âge.
Décentralisation
S’il a rappelé le rôle essentiel de l’État centralisateur comme colonne vertébrale de l’histoire de France, David Lisnard a axé son propos sur l’importance des réformes décentralisatrices engagées et réussies depuis plus de quarante ans. Affirmant que "la proximité crée la responsabilité", le nouveau président des maires de France conclut son discours sur le rôle essentiel des édiles dans la transition écologique, notamment dans sa mise en application concrète dans les territoires, ainsi que sur la nécessité d’une plus grande intégration de l’Outre-mer et le besoin de plus amples perspectives pour les jeunes des territoires ruraux.
Émile Le Scel