« Cash is king ». Si la formule est devenue le mantra des directions financières depuis des années, la crise sanitaire mondiale actuelle le met à rude épreuve. Après une semaine de confinement en France, les entreprises hexagonales s’organisent pour pallier le risque de liquidité et les banques se préparent.

Le constat est simple. Les marchés court terme, le Neu CP, comme long terme, obligataire, se sont rapidement fermés. « Ce n’est pas surprenant », explique le responsable trésorerie d’une grande entreprise, « sans vision, les investisseurs ne savent pas comment réagir. Et il ne s’agit pas d’une question de prix ou de qualité. »  Impossible aujourd’hui pour la profession d’émettre ou de rouler les positions. Ainsi, si l’environnement se dégrade et que les marchés restent fermés, la seule solution, pour tout le monde, sera d’avoir recours au crédit bancaire.

Une situation différente de celle de 2008

Si l’effondrement des marchés rappelle les événements de 2008, les deux situations ne sont pas comparables. Il y a douze ans, la crise tirait son origine des banques, et avait entraîné avec elle l’activité économique. « Ce que nous vivons aujourd’hui est un ralentissement économique issu des décisions prises par les gouvernements pour juguler la pandémie du Covid-19 » développe un professionnel de la finance. Les établissements financiers ne sont pas en crise réelle, même si les demandes de financement engendreront forcément un stress.

Les entreprises ont appris à gérer leurs liquidités et pourront, dans un premier temps, poursuivre leur activité grâce aux réserves de cash dont elles disposent. Les établissements bancaires se préparent à répondre à la demande de leurs clients à qui ils envoient un message positif :  ils sont prêts à les accompagner et montrent leur volonté de participer à l’effort. « On ressent une certaine fierté des banquiers à faire leur métier » s’accordent les trésoriers. D’autant plus que les dispositions de la BCE leur permettent de faire face aux besoins des entreprises.

PME vs grandes entreprises

Il faut néanmoins distinguer deux cas de figure. D’un côté, les grandes entreprises qui bénéficient déjà de lignes garanties – plus de 300 milliards d’euros selon les chiffres de la Banque de France. Ces dernières, juridiquement contraignantes pour les banques, ne pourront pas leur être refusées au moment où elles demanderont à les tirer pour éviter le défaut. De l’autre, les PME disposent de crédits bancaires au cas par cas et sont déjà sujettes à des problèmes de liquidité. Elles devront donc négocier une augmentation de leurs facilités de crédit. Une situation plus délicate puisque leur situation dépendra alors de la bonne volonté des banques et de l’attitude du gouvernement. Sans oublier la participation de Bpifrance.

Dans le cas des entreprises notées, elles doivent montrer qu’elles ont la capacité de fonctionner entre douze à dix-huit mois avec leurs lignes de crédit et leur trésorerie. Combien de temps le pourront-elles avant d’avoir recours au crédit bancaire ? « Cela dépendra de la situation de chacun », avance un trésorier, « ce n’est pas un hasard si Air France a tiré en premier sa ligne de crédit, les compagnies aériennes étant les premières à avoir perdu la totalité de leur chiffre d’affaires ». À l’inverse, les sociétés du secteur alimentaire, dont la clientèle de particuliers paie comptant, ne devraient pas rencontrer de problème de liquidité à court terme.

Anne-Gabrielle Mangeret

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