Fin 2011, CPR AM comptait près de 17 milliards d’euros d’encours sous gestion. Elle entame 2019 avec plus de 47 milliards d’euros investis dans ses fonds. La société de gestion thématique du groupe Amundi, sous la houlette de Valérie Baudson, et son effectif de 110 collaborateurs n’entend pas s’arrêter en si bon chemin. Entre disruption et regard porté vers l’avenir, Emmanuelle Court, directeur général délégué en charge du développement commercial, revient sur l’activité de l’un des leaders français de la gestion d’actifs.

Décideurs. Comment vous positionnez CPR AM au sein d’Amundi ?

Emmanuelle Court. CPR AM est une entité autonome dans ses choix stratégiques et de développement, tant sur le plan innovation produits que sur le plan marché. Notre schéma est assez unique sur la place, notamment par le fait d’avoir réussi à maintenir et tirer le meilleur de cet équilibre dans la durée. Avec un peu de recul, nous observons une réussite collective dans le développement de cet écosystème. Cet équilibre est sous tendu par des succès remportés notamment grâce à l’éventail large des expertises de gestion que nous proposons à nos clients comme la gestion diversifiée et l’allocation en ETF, la gestion thématique actions. Il en va de même concernant l’ouverture à la distribution retail alors qu’historiquement notre prisme était plus institutionnel. D’une certaine manière, nous avons acquis notre autonomie au fil des années.

Comment avez-vous ressenti l’effet marché cette année ?

Les marchés n’ont malheureusement épargné personne en 2018.  Bien que nous ayons, comme nos homologues, subit un effet marché négatif, notamment sur le dernier semestre de 2018, nos partenaires investisseurs continuent de nous faire confiance. Nous avons enregistré une collecte nette positive de près de 3 milliards d’euros à la fin de l’année 2018, notamment sur nos stratégies moyen-long terme.

Quelle stratégie allez-vous adopter pour proposer des alternatives ?

Nous poursuivons le développement de nouvelles thématiques. Avec l’émergence de la gestion passive, notre gestion active est de plus en plus challengée. Pour nous démarquer, il est essentiel d’offrir à nos clients des solutions novatrices à forte valeur ajoutée…une démarche dans laquelle s’inscrit la gestion thématique. La première étape de ce processus a été marquée par le lancement de notre premier fonds thématique sur le vieillissement de la population, CPR Silver Age, fin 2009. Notre positionnement s’est vu renforcé et conforté dans la mesure où Amundi a fait de CPR AM en 2015, le wagon thématique du groupe. Fin 2016, nous avons lancé Global Disruptive Opportunities, qui rencontre un succès international.  Fin 2017, nous avons lancé le fonds Food For Generations et en 2018 nous avons lancé le premier fonds dédié à l’Education. Récemment, nous avons annoncé le lancement de notre fonds consacré au changement climatique Climate Action. Ce dernier a été créé en partenariat avec une ONG nommée CDP (Carbon Disclosure Project) dont l’activité est de collecter l’ensemble des informations relatives à la consommation d’énergie pour des milliers d’entreprises à travers le monde. Le point commun de ces trois derniers fonds est qu’ils intègrent une dimension ESG et à impact.

À qui s’adressent ces thématiques ?

Elles s’adressent aussi bien à une clientèle patrimoniale qu’à une clientèle institutionnelle au regard des enjeux recouverts par nos thématiques.

Depuis quand implémentez-vous les critères ESG dans vos solutions ?

La prise en compte des enjeux Environnementaux, Sociaux et de Gouvernance (ESG) est, aujourd’hui, une priorité. Il y a maintenant deux ans, nous avons conçu notre propre méthodologie ESG par les risques que nous déployons sur l’ensemble de nos classes d’actifs actions, crédit et obligations convertibles. Tout en nous appuyant sur l’analyse ISR d’Amundi, qui dispose d’une quinzaine d’analystes sur le sujet, nous avons littéralement « ouvert le capot » en opérant une subdivision détaillée et une analyse précise des critères E, S et G en vue de rechercher la matérialité financière pour chaque valeur.

Quels enjeux recouvre l’écosystème de l’éducation ?

C’est un enjeu très fort, notamment dans les pays émergents et plus particulièrement la Chine dont la classe moyenne ne cesse de croître. C’est d’ailleurs le premier budget du pays. En France, l’éducation est très orientée vers le secteur public. Il ne s’agit pas seulement de transmettre des connaissances, c’est aussi un moteur de croissance économique pour les individus, les entreprises et les Etats. Identifiée par l’ONU comme l’un des 17 objectifs de de développement durable, l’éducation est la clé pour en atteindre d’autres : rompre le cycle de la pauvreté, réduire les inégalités, offrir la possibilité d’une vie meilleure… Alors que la demande est croissante dans le monde et notamment les pays émergents, la disruption que connaît notre société et le monde du travail requiert des adaptations considérables. 

Vous évoquez la disruption. N’est-ce pas qu’un concept à la mode ?

Ce n’est pas le cas chez CPR AM. Nous assumons pleinement d’utiliser ce terme. De nombreux acteurs ont tendance à ne s’intéresser qu’à la partie digitale. Nous nous concentrons sur tous les grands segments dans lesquels celle-ci intervient tels que la santé, l’industrie ou l’environnement. Les entreprises disruptives bousculent les règles du jeu de leur secteur en transformant un marché existant ou en créant un nouveau marché au travers de solutions plus simples, rapides ou moins chers. De plus, la disruption a toujours existé ; elle est cependant en accélération exponentielle grâce aux effets combinés des évolutions technologiques, de la mondialisation et des changements démographiques et environnementaux.

Propos recueillis par Yacine Kadri

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