Face aux critiques liées au coût des Jeux, Carole Gomez, chercheuse à l’Iris (Institut de relations internationales et stratégiques) et spécialiste de l’impact du sport dans les relations internationales, rappelle que, au CIO, l’heure est désormais au contrôle des dépenses et à la durabilité des infrastructures. Rassurant.

Décideurs. Paris vient d’obtenir l’organisation des JO de 2024, peut-on y voir une véritable victoire ?

Carole Gomez. Oui, sans aucun doute. Le fait que le suspense soit retombé après le retrait de Los Angeles ne doit pas faire oublier les deux années de compétition réelle qui se sont écoulées, ni le fait qu’il y a encore six mois, personne ou presque n’aurait parié sur cette victoire. En mettant un terme à une histoire d’échecs à répétition (en 1992 face à Barcelone, en 2008 face à Pékin et en 2012 face à Londres), celle-ci prouve que la ville a mené une réflexion approfondie pour retravailler sa candidature.

Que penser des critiques dénonçant le coût de cette organisation pour Paris ?

Au cours des dernières années, le coût des Jeux a connu une énorme inflation, l’inquiétude sur ce point est donc légitime. Mais dans le cas de Paris, les aléas devraient être maîtrisés au maximum puisque, alors que les autres villes organisatrices avaient dû construire entre huit et seize infrastructures, elle n’en aura que quatre à bâtir : une piscine olympique, un stade de 8 500 places, le village olympique et le village médias, ce qui devrait limiter le risque de retard à la livraison et donc, de surcoût à l’arrivée.

Autre sujet d’inquiétude : la « durabilité » de ces installations et l’usage qui en sera fait après 2024…

Cette question est en effet centrale. On sait d’ores et déjà que le village olympique et le village médias seront remis à la population, l’idée étant, à terme, de faire de ces installations des nouveaux quartiers et non des vestiges des JO. Il y a eu par le passé trop d’infrastructures coûteuses construites pour les Jeux et jamais utilisées par la suite. Le CIO (Comité international olympique) ne peut plus se permettre ce type de dérives. Sur ce plan, on assiste à un véritable tournant dans l’esprit des Jeux.

Le CIO pourrait-il prôner plus de sobriété en matière d’organisation des JO ?

Disons plutôt qu’il en appelle à moins de démesure. Il y a eu trop de scandales, trop d’excès liés au fait que le CIO imposait aux villes candidates un cahier des charges trop exigeant. Cela les incitait à la surenchère et aboutissait à des budgets exorbitants. Le CIO ne peut plus cautionner ce genre de dérive, il a fait l’objet de trop de critiques. Il y va de sa crédibilité et de sa réputation.

Quel sera le rôle du CIO désormais ?

Ce ne sera évidemment pas un rôle de supervision autoritaire mais d’accompagnement et d’orientation. Le CIO sait que, si les budgets ne sont pas davantage maîtrisés et que les infrastructures ne s’inscrivent pas dans la durée, les candidats se feront de plus en plus rares. Pour éviter cela, il n’a plus le choix : il doit composer avec la réalité économique des pays. Cela implique moins de démesure en termes d’investissements et plus de durabilité en termes d’usage des installations olympiques. C’est ce qui permettra de faire de l’organisation des Jeux une ambition plus vaste que les Jeux eux-mêmes : un accélérateur de projets sociétaux, un outil d’insertion… Tout le contraire d’un éléphant blanc.

Propos recueillis par Caroline Castets

 

 

 

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