À la tête du Groupe Equad, groupe indépendant de conseil et d’intervention dans la prestation de services dans la gestion et le traitement de sinistres et des litiges, Guy Caumes partage sa vision de l’Afrique. L’entité dédiée au continent, Afrique Risques Conseil (ARC), a permis de mettre en œuvre la nouvelle stratégie. Retour sur les évolutions et l’approche du groupe.

Décideurs. Remontons dans le temps. Quelle est la genèse de la stratégie africaine du groupe ?

Guy Caumes. Il faut remonter aux origines d’Equad dans les années 1980, quand le groupe est né sous la forme d’une « start-up de conseil ». À l’époque, la Côte d’Ivoire montait en puissance, et en 1988, je me suis associé avec des personnes à Abidjan, où nous avons développé, avec une vingtaine de collaborateurs, des activités sous le nom d’Afrique Expertise. Nous nous étions aussi implantés dans la sous-région. Vers 1993-1994 avec la grande dévaluation du franc CFA, nous avons connu les premières difficultés. Par la suite, la guerre a éclaté et nous avons dû fermer le bureau d’Abidjan en 1998, ainsi que tout le réseau partenaire d’Afrique de l’Ouest. En 2010, lorsque nous avons été sollicités par des groupes d’assurance européens et des réassureurs, nous sommes revenus sur le continent avec l’entité Afrique Risque Conseil (ARC). L’objectif ? Être les relais pour des assureurs ou des réassureurs français et des groupes français dans la sous-région. La guerre étant encore présente en Côte d’Ivoire à l’époque, nous avons décidé de nous installer à Dakar, le Sénégal pouvant servir de hub pour l’ensemble de la sous-région.

Quels sont vos axes de développement ?

Il en existe deux. Tout d’abord, malgré l’instabilité de certains pays de la zone, l’Afrique de l’Ouest présente un potentiel économique pour le développement de nos services. Dans la zone dite Cima1, de culture et de pratique francophone, nous avons un réel atout. Dans la gestion des risques, aussi bien que dans la couverture de risques, la législation est similaire au droit français. D’ailleurs, sur le marché de Londres, la souscription des polices d’assurance ou de traités de réassurance pris en français – voire en anglais – font référence au droit français. Nous avons une place de choix à tenir sur les marchés de l’assurance en Afrique, eu égard au développement des économies allant du Maghreb au Congo-Brazzaville. Cette opportunité est aussi due à la langue française. Nous nous appuyons sur son déploiement dans la zone, en partenariat avec le Club Francorisk2 de l’Amrae3 visant à la promotion de la langue française dans le monde de l’assurance. D’autant que les assureurs européens et les réassureurs sont prêts à nous accompagner, et ont de nombreuses activités dans la zone.

Le taux de pénétration du marché de l’assurance en Afrique est extrêmement faible. Dans ce contexte, quelle est l’approche d’Equad ?

L’Afrique est aujourd’hui l’un des derniers territoires où les investissements vont s’intensifier dans les trois prochaines décennies. D’ailleurs cela a déjà commencé. On le remarque dans les domaines de base : la mine, les énergies, des matières premières végétales par exemple. Nous voulons être les premiers sur place. Il est urgent de saisir cette opportunité en étant présents au bon moment. D’autant que la concurrence est vaste, notamment avec l’arrivée des Chinois, également désireux de s’approprier des parts de marché. Mais eux aussi nécessitent des relais de culture française, ce qui nous confirme le bien-fondé de notre démarche. Nous installons aujourd’hui une plate-forme de travail à Dakar, avec trois objectifs : fixer les populations recrutées localement, former les collaborateurs au traitement des sujets français et avoir une force de frappe opérationnelle sur toute l’Afrique subsaharienne.

Comment envisagez-vous le développement du continent ?

Nous envisageons le recrutement de 200 collaborateurs, à la fois en France mais aussi dans le monde entier, et notre objectif est de tripler notre chiffre d’affaires de 60 millions d’euros d’ici trois ans. Nous allons pour ce faire étendre nos activités au transport, au ferroviaire et au maritime. Évidemment, nous avons de fortes marges de progression sur le continent, qui doit devenir un relais de croissance pour notre groupe. Nous sommes optimistes et continuons de penser qu’il est plus facile pour nous de s’implanter dans un pays francophone et d’y avoir un niveau d’influence important. Nous devons capitaliser sur cet atout ! Et notre réussite sera solidaire de l’accompagnement des populations locales. Il est fondamental d’être autre chose que des expatriés. Notre métier est fait uniquement de matière humaine.

 

E.S.

 

1
La Conférence interafricaine des marchés d'assurance (Cima) regroupe les pays suivants : Bénin, Burkina Faso, Cameroun, Congo, Côte d'Ivoire, Gabon, Guinée-Bissau, Guinée équatoriale, Mali, Niger, République centrafricaine, Sénégal, Tchad, Togo.

2
Club francophone du management des risques et des assurances.

3
Association du management des risques et des assurances de l’entreprise.

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