Ancien contrôleur financier de B&B Hôtels, Julien Guintrand a pris la tête de la direction financière en mars 2016. Il revient sur la stratégie de développement du groupe, qui compte déjà 360 établissements dans près d’une dizaine de pays.

Décideurs. B&B Hôtels a été racheté en mars par le fonds d’investissement PAI. Quels sont vos objectifs de développement ?

Julien Guintrand. Le groupe compte aujourd’hui 360 hôtels dans sept pays et notre chiffre d’affaires augmente de plus de 11 % par an en moyenne depuis 2010. Notre objectif est de générer un maximum de valeur pour nos actionnaires. Pour cela, nous allons poursuivre notre croissance organique au rythme d’une trentaine d’ouvertures par an. Historiquement, nous nous sommes développés en construisant de nouveaux hôtels, mais nous sommes attentifs aux opportunités : nous avons acquis des bâtiments déjà existants pour nous implanter en Espagne par exemple, et nous n’excluons pas de racheter des réseaux de deux à quarante hôtels. Le but est de s’adapter aux marchés sur lesquels nous sommes implantés – la France, l’Allemagne, l’Italie, la Pologne, l’Espagne, la République tchèque et le Maroc. Nous prévoyons de continuer à nous développer en Europe afin d’achever notre maillage territorial, en Suisse et en Belgique notamment, mais aussi en Amérique du Sud avec une première ouverture au Brésil en 2019.

 

Décideurs. Comment financez-vous la croissance de votre parc hôtelier ?

J. G. La construction d’un hôtel de cent chambres coûte environ cinq millions d’euros. Avec une trentaine d’ouvertures par an, cela représente un investissement annuel de plus de cent cinquante millions d’euros. Nous avons commencé par une stratégie simple : construire, ouvrir puis revendre l’établissement à une foncière tout en restant locataire. Mais depuis 2013, nous avons noué des partenariats avec des investisseurs financiers afin d’accélérer notre développement en pré-finançant la construction de nos hôtels. Concrètement, nos développeurs trouvent des emplacements et construisent un business plan. Une fois le projet accepté et validé, nous le présentons à des investisseurs. Ces derniers financent la construction du bien et nous devenons locataires par l’intermédiaire d’un BEFA – bail en état futur d’achèvement – qui court sur douze ans en France, renouvelables une à deux fois. À travers le paiement d’un loyer nous offrons aux investisseurs un rendement de 6 % à 7 % indexé sur l’inflation. Nous nous développons suivant une stratégie dites « asset light » : nous détenons seulement cinq des 360 hôtels sous la marque B&B. Nous ne finançons que le mobilier et le matériel (« FF&E »), qui représentent environ 10 % du coût de l’hôtel. 

 

Chaque pays dans lequel nous sommes implantés a sa propre direction financière

 

Décideurs. La façon dont B&B manage ses hôtels fait également partie de cette stratégie « asset light ». Pouvez-vous nous en parler ?

J. G. Seuls nos hôtels « vitrines » sont gérés par nos propres équipes, comme l’établissement ouvert à Marne-la-Vallée en décembre dernier, sur le parc hôtelier de Disneyland Paris. Les autres établissements du groupe font l’objet d’un contrat spécifique, la gérance-mandat. Le gérant-mandataire est une société sous-traitante spécialisée en gestion hôtelière. Elle le gère avec son propre personnel, sa propre organisation et perçoit une commission correspondant à un pourcentage du chiffre d’affaires. L’avantage de cette solution est que nous sélectionnons des entrepreneurs, qui, de par leur mode de rémunération, ont une forte incitation à réaliser de bonnes performances.

 

Décideurs. La gestion financière du groupe est très décentralisée. Comment fonctionnez-vous au quotidien ?

J. G. Chaque pays dans lequel nous sommes implantés a sa propre direction financière qui me reporte. Cette organisation nous permet à la fois d’être proches des problématiques opérationnelles et de conserver des circuits de décision très courts. Nous travaillons en collaboration et partageons les mêmes process. Par exemple, la revue des investissements obéit aux mêmes règles pour tous les pays. Cela veut dire que lorsque l’une des directions régionales présente un projet au conseil de surveillance du groupe, celui-ci peut le comparer facilement avec des opérations similaires dans un pays voisin. Cela permet également de faciliter la définition d’une stratégie globale d’allocation du capital.

 

Décideurs. Quel est selon vous le rôle d’un bon directeur financier ?

J. G. Aujourd’hui, le DAF est de plus en plus intégré dans les décisions stratégiques de l’entreprise. Il a une vision transversale précieuse pour la direction générale. Le directeur financier est avant tout garant des chiffres et de l’information financière : maîtriser ce socle lui permettra d’avoir la crédibilité nécessaire à une bonne collaboration avec le directeur du développement, la direction générale et les investisseurs, qui prennent appui sur ces données dans leurs prises de décisions.

 

Propos recueillis par Camille Prigent

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