François Jolivet, député LREM de l’Indre, est à l’initiative d’une proposition de loi "portant interdiction de l’écriture inclusive pour les personnes morales en charge d’un service public". Décideurs vous présente en avant-première les grandes lignes du texte et les cosignataires.
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François Jolivet, député LREM de l'Indre est à l'initiative de cette proposition de loi.

Un article unique

Si certaines propositions de loi nourrissent plusieurs objectifs, celle déposée par le député François Jolivet a un but simple. Elle comporte donc l’article unique que voici :

Vu l’article 2 de la Constitution française du 4 octobre 1958, disposant que “la langue de la République est le français”.

Avant l’article L100-1 du Code des relations entre le public et l’administration, insérer un article ainsi rédigé :

1° Les personnes morales en charge d’une mission de service public doivent se conformer aux règles grammaticales et syntaxiques édictées par l’Académie française.

 2° Les pratiques rédactionnelles et typographiques visant à substituer à l’emploi du masculin générique, une graphie faisant ressortir l’existence d’une forme féminine, ne sont pas autorisées.

3° Les dispositions de la présente loi entrent en vigueur six mois après sa promulgation.

Exemple d’écriture inclusive

Dès le début de l’exposé des motifs, quelques exemples d’écriture inclusive en vigueur dans certains services publics sont cités : "Ainsi, on découvre au hasard de publications parfois officielles des mots nouveaux, « iels » pour « ils/elles », « toustes » pour « tous/toutes », « celleux » pour « celles/ceux », « Cher·e·s lecteur·rice·s déterminé·e·s… Les règles d’accord n’existeraient-elles plus ? Devons-nous penser que la modification des règles d’usage de la langue française littéraire serait le moyen de parvenir à cette égalité, que nous appelons tous de nos vœux ?"

L’écriture inclusive : militante, minoritaire et condamnée

L’exposé des motifs souligne le caractère politique et minoritaire de l’écriture inclusive définie comme "un choix personnel et militant de modifier l’orthographe". Il note également que "les militants de l’écriture dite inclusive usent de tous les moyens pour imposer à la société leur vision très personnelle et en rien majoritaire".

"Les militants de l'écriture dite inclusive usent de tous les moyens pour imposer à la société leur vision très personnelle et en rien majoritaire"

Il rappelle également que, le 16 octobre 2017, "le ministre de l’Éducation nationale s’est déclaré contre son utilisation dans les manuels scolaires". Dix jours plus tard, c’est l’Académie française qui a "alerté sur le risque d’aboutir à une langue désunie, disparate dans son expression, créant une confusion qui confine à l’illisibilité". Le texte relève également que le 21 novembre 2017, "par la circulaire relative aux règles de féminisation et de rédaction des textes publiés au Journal officiel de la République française, le Premier ministre a mis fin aux tentations militantes dans l’administration de l’État en rappelant que celle-ci devait se conformer aux règles orthographiques et grammaticales en vigueur". Enfin, le 6 septembre 2020, "la ministre de la Culture, gardienne du patrimoine littéraire, a rappelé que l'écriture inclusive était une démarche élitiste". Malgré tout, l’utilisation de l’écriture inclusive continue à gagner du terrain.

Une écriture excluante

Le texte présenté aux députés insiste sur le fait que "les experts de la dyslexie, dyspraxie et dysphasie sont préoccupés et alertent sur les difficultés supplémentaires engendrées par cette forme d’écriture. Nos concitoyens malvoyants ou aveugles sont inquiets de sa progression, car les dispositifs de lecture qu’ils utilisent sont inopérants. L’avènement de l’écriture inclusive complexifie l’apprentissage de la langue française, puisqu’elle consacre une rupture entre la langue parlée et la langue écrite". Cette nouvelle mode contribue à brouiller la nature même des messages adressés.

Une pratique qui n’est pas française

En somme, l’écriture inclusive est un dérivé du français, mais ce n’est pas du français. Ce qui va à l’encontre de l’article 2 de la Constitution qui dispose que "la langue de la République est le français". Le texte législatif mentionne par ailleurs que "la langue nationale est un facteur d’intégration, d’appartenance et de rayonnement de la culture française. En 2006, le législateur a d’ailleurs imposé la maîtrise de ses fondamentaux aux personnes souhaitant être naturalisées".

Pas d’interdiction globale à l’étude

La proposition de loi concerne uniquement les personnes morales en charge d’un service public. "Si chacun est libre d’utiliser divers moyens de communication dans son espace privé, les entités en charge d’une mission de service public ainsi que leurs agents ne doivent pas communiquer par écrit dans une langue aussi incomprise que discriminante".

Les députés cosignataires

Pour le moment, une quarantaine de députés soutiennent la proposition et le chiffre pourrait augmenter, le texte étant encore ouvert à la signature. Parmi eux, se trouvent des élus du groupe LREM tels qu’Aurore Bergé (Yvelines), Sylvain Maillard (Paris), Cendra Mottin (Isère). Plusieurs membres des groupes Modem ou Agir soutiennent également l’initiative : Laurence Vichnievsky (Puy-de-Dôme), Agnès Firmin Le Bodo (Seine-Maritime).

Dans l’opposition, plusieurs députés du groupe LR ont également co-signé le projet. C’est notamment le cas de Julien Aubert (Vaucluse), Thibault Bazin (Meurthe-et-Moselle), Marc Le Fur (Côtes-d’Armor), Virginie Duby-Muller (Haute-Savoie), Guillaume Peltier (Loir-et-Cher).

Plusieurs membres du Palais Bourbon siégeant dans des groupes politiques de gauche seraient disposés à voter en faveur de cette proposition de loi qui semble rassembler pratiquement tous les bords politiques de l’hémicycle. L’initiative pourrait également inciter les ministères à imposer par circulaires la limitation de l’écriture inclusive dans leurs administrations. Affaire à suivre.

Lucas Jakubowicz

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