L’organisation internationale désapprouve le système d’imposition français sur les revenus des brevets, à un taux réduit actuellement à 15%. Si celui-ci ne devrait pas changer, le gouvernement annoncera prochainement les mesures de durcissement du régime fiscal des brevets, ce qui inquiète les entreprises de l’Hexagone.

Afin d’encourager l’innovation technologique des entreprises situées sur son territoire, la France dispose depuis 1965 d’un régime de taxation réduit des produits tirés de l’exploitation des droits de propriété industrielle. Les sociétés tricolores peuvent ainsi générer un bénéfice plus important des produits issus de leurs travaux de recherche et développement, en s’acquittant d’un impôt sur les sociétés à un taux préférentiel de 15 % sur les revenus de cession ou concession de leurs licences de brevets (un taux bien inférieur aux 33 % habituels).

Ce régime fiscal, avantageux pour les entreprises, est désormais dans le viseur de l’Organisation de coopération et de développement économique (OCDE) et de l’Union européenne, car jugé trop facile à contourner. Le durcissement de la fiscalité encouragé par ces institutions, vise principalement à empêcher la fraude fiscale. En effet, leur but est d’éviter que les sociétés ne placent leurs activités de recherche et développement dans un paradis fiscal ou encore qu’elles fassent détenir leurs brevets dans des pays à la fiscalité avantageuse, où elles n’ont aucune activité réelle.

Après le Luxembourg, l’Irlande et les Pays-Bas où les taux d’imposition des brevets gravitent autour des 6 %, c’est donc au tour de la France de se mettre en conformité avec les règles adoptées par l’Union européenne.

Un régime préférentiel limité

Bercy prévoit de débattre avec les parlementaires de la réforme de la fiscalité des brevets en fin d’année, ce qui préoccupe les entreprises françaises depuis plusieurs mois. Le régime fiscal préférentiel sur les produits de propriété industrielle, défini par « l'article 39 terdecies » du Code général des impôts, envisage de maintenir un taux d'imposition réduit à 15 % sur les revenus des brevets, mais de le limiter uniquement aux entreprises déposant des brevets issus d’innovations intégralement développées sur le sol français. Pour ce faire, l’OCDE incite à mettre en pratique le critère du “nexus” qui implique que les avantages fiscaux doivent désormais être corrélés avec les dépenses de recherche engagées dans le pays.

Des mesures pointées du doigts par l’Afep

Quelques jours après l’annonce par Le Figaro des futurs changements apportés au régime fiscal des brevets, les entreprises françaises s’avouent déçues. Et pour cause, au printemps dernier, une quinzaine de grands groupes s’étaient rassemblés pour proposer, en contrepartie de cette limitation du champ d’application du régime fiscal, une baisse de l’imposition qui n’a pas été entendue.

L’Association française d’économie politique (AFEP), qui représente ces grands groupes français, fait remarquer que les entreprises qui innovent en interne sans déposer de brevet vont donc doubler leurs impôts, ce qui risque, à terme, de nuire à leur croissance. L’AFEP proteste contre cette mesure qui, d’après elle, ne vise qu’un objectif budgétaire, et ne se cantonne pas uniquement à lutter contre la fraude fiscale.

Si cette réduction du champ d’application du régime fiscal déplait, cette réforme apporte néanmoins une amélioration pour les entreprises. Désormais, les logiciels pourront  être retenus dans les redevances éligibles au taux réduit à 15% comme l’a annoncé le Premier ministre, Edouard Philippe, le 20 septembre 2018. Cette nouvelle réforme fiscale qui aligne la France sur ses voisins, s’inscrit dans un «plan d’action» pour la transformation numérique de l’industrie et sera insérée dans le projet de loi de finances 2019, présenté en Conseil des ministres le 24 septembre prochain.


Laura Breut (@LauraBreut)

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