Telegram : une ICO historique inquiétante

Que l’on soit partisan ou détracteur de la start-up des frères Dourov, Telegram, il faut reconnaître que la messagerie chiffrée est en train de marquer l’histoire de la finance mondiale avec une Initial Coin Offering (ICO) – une émission de jetons numériques en échange de cryptomonnaies – qui lui a déjà permis de lever 850 millions de dollars. L’opération pourrait même drainer jusqu’à 3,8 milliards de dollars. Jusqu’ici, le marché des ICO n’avait jamais connu pareille demande de « tokens », ces jetons qui se différencient des traditionnelles actions lors des IPO : ici, les « tokens » ne sont pas des parts de société mais permettent à leur propriétaire de financer directement le projet de l’entreprise émettrice et de voir leur valeur évoluer en fonction de la réussite de l’affaire. Mais que fait donc Telegram pour susciter autant d’intérêt chez les investisseurs ? Outre la fonction existante de messagerie sécurisée (texte, photo, vidéo…), l’entreprise américaine souhaite créer la première cryptomonnaie grand public, le « Gram », et l’adosser à sa technologie blockchain TON afin de permettre à ses utilisateurs de réaliser des micropaiements affranchis de taxes internationales par exemple. S’il est ardu de critiquer le progrès induit par cette initiative, ce sont les montants levés et le manque d’expérience des équipes de Telegram qui refroidissent certains des spécialistes les plus éminents en matière de monnaie numérique. Gregory Klumov, patron de Stasis et spécialiste de la blockchain, dénonce un financement n’ayant « aucune réalité économique ». La société n’a jamais été rentable et vit notamment des dons de ses fondateurs. De plus, passée la notoriété des frères Dourov, Telegram manquerait cruellement d’expert reconnus pour gérer un chantier aussi vaste que celui qu’il aime à décrire, révolutionnaire. Les « tokens » sont jetés…   

FS