Le cheval pourrait être comparé à un ballon. Un ballon est utilisé dans plusieurs sports, seule sa forme change. Pour le cheval c’est similaire, il existe différentes disciplines : les courses (de trot ou de galop), le dressage, le saut d’obstacles... Les aptitudes du cheval sont différentes selon le "monde" dans lequel il évolue et les investissements financiers très différents d’un univers à l’autre. Il conviendra dans les lignes ci-dessous d’invoquer seulement le monde dans lequel j’évolue depuis ma jeunesse qu’est celui du cheval de jumping (saut d’obstacles).
Comment en vient-on à investir dans un cheval de jumping ? Est-ce un investissement plaisir tel qu’une danseuse qu’on entretient ou est-il possible d’obtenir un rendement et envisager de belles performances en la matière ?

 

Avant de répondre à ces questions, il me semble important de rappeler quelques chiffres : l’équitation est le troisième sport pratiqué en France, derrière le football et le tennis. Chaque année, en moyenne 80 000 chevaux, toutes races confondues, sont échangés sur le marché français.
 
Le prix d’un cheval de jumping est déterminé selon différents facteurs tels que son âge, son sexe, ses capacités sportives (capacités à sauter plus ou moins haut et être compétitif sur les épreuves dans lesquelles il concourt), son pedigree et son état physique (une visite vétérinaire comportant différentes radios est systématiquement réalisée avant la vente du cheval). Je n’évoquerais pas ici le coût de l’entretien d’un cheval de jumping mais il doit évidemment être pris en compte lorsque l’on souhaite réaliser ce type d’investissement.

 

Le marché du cheval de jumping

 

Pour comprendre le marché du cheval de jumping, commençons par des extrêmes : en 2013, le cheval Palloubet d’Halong âgé de 10 ans au jour de la vente et évoluant au plus haut niveau, a été vendu 11 millions d’euros. Il s’agit du cheval vendu le plus cher au monde. Ce record n’a pas été égalé depuis. En 2022, le record mondial a été atteint pour un foal, poulain âgé de 6 mois, adjugé 360 000 euros lors d’une vente aux enchères.

 

"En 2013, le cheval Palloubet d’Halong âgé de 10 ans et évoluant au plus haut niveau, a été vendu 11 millions d’euros"

Mais revenons à la réalité du marché du cheval de jumping : un foal est vendu en moyenne 10 000 euros quand un cheval de 3 ans, prêt à débuter sa carrière sportive sera vendu entre 20 000 et 30 000 euros en moyenne en fonction de ses aptitudes sportives et de son pedigree. Le pedigree, appelé « origines » dans le jargon équestre, est une variable importante à prendre en considération au moment de l’acquisition : étude des performances sportives du père, de la mère, générations précédentes et collatérales.

 

Ce même cheval acheté 20 000 ou 30 000 euros pourra être revendu 200 000 euros, voire 300 000 euros à l’âge de 7 ans par exemple s’il s’avère avoir de réelles aptitudes pour le haut niveau (capacité à sauter au moins 1m50 à l’âge de 10 - 12 ans), comme être revendu 80 000 euros à 8 ans si ses capacités sont un peu moins « bonnes » qu’espérées (capacité à sauter 1m40 à l’âge de 10 - 12 ans). Un cheval évoluant au plus haut niveau aujourd’hui est valorisé plusieurs millions d’euros. Vous l’aurez compris, plus un cheval a la capacité à sauter haut et être compétitif et plus son prix sera à six, sept, voire huit chiffres.

Le monde du cheval de jumping a considérablement évolué ces dix dernières années : la qualité des infrastructures requises pour pratiquer ce sport est très onéreuse, le nombre d’élevages de chevaux de sport diminue et le prix des chevaux s’envolent. Pour autant, le nombre de compétitions internationales au plus haut niveau se développe  sensiblement aux quatre coins de la France.

Comme c’est déjà le cas aux États-Unis, ce sport devient réservé à une certaine élite en France. Compte tenu de ces évolutions, des opportunités d’investissement se créent !

 

Deux typologies d’investisseurs

 

Il est temps de s’intéresser à l’investisseur. Il convient de distinguer deux typologies d’investisseurs en matière de chevaux de jumping. D’un côté l’investisseur passionné qui est à la recherche avant tout du plaisir de pratiquer ce sport et l’investisseur qui investit dans un objectif de recherche de rentabilité. Dans le premier cas, l’amour du cheval et du sport risque de prédominer sur l’investissement. Dans le second, l’investisseur sera dans une logique de diversification de ses investissements et à la recherche d’une rentabilité des sommes investies.

 

"À la différence des chevaux de course, les gains générés par un cheval de jumping ne génèrent pas une réelle rentabilité pour l’investisseur"

Quand on parle de rentabilité dans le milieu du cheval de sport, il est pertinent de s’attarder seulement au potentiel de plus-value générée par la vente d’un cheval. À la différence des chevaux de course qui profitent des paris en ligne pour générer des gains en fonction des classements et ainsi accroître leur rentabilité, les bénéfices obtenus pour un cheval de jumping ne sont pas forcément conséquents et ne procurent pas une réelle rentabilité pour l’investisseur. L’achat/revente est donc le seul vecteur de rendement de cet investissement.

 

Deux manières d’investir

 

Quand on souhaite investir dans ce monde-là, deux possibilités s’offrent à l’investisseur. La première est de réaliser un investissement dans un cheval plus ou moins âgé en fonction de sa capacité financière et espérer réaliser une plus-value suffisamment importante. Une moins-value peut également être réalisée en cas de contre-performances, ou dans la situation où le cheval se blesse en cours de route et devient inapte au sport.

 

L’autre possibilité est d’investir au travers d’un club deal regroupant un pool d’investisseurs mettant des fonds en commun et qui ont vocation à investir dans plusieurs chevaux d’âges différents. Dans cette hypothèse, il s’agit de mutualiser le risque grâce à l’acquisition de plusieurs chevaux. Ce club deal peut facilement être comparé à un fonds de venture capital. Prenons l’exemple d’un club deal investissant sur dix chevaux. Sur le nombre de chevaux acquis par le club deal, un tiers sera revendu sans réaliser de plus-value, un autre tiers sera revendu en réalisant un multiple de x2 et un dernier tiers sera cédé avec un multiple supérieur à x2.

 

Tout comme un fonds de venture capital, le Graal est de dénicher la licorne de demain, qui dans notre jargon s’appelle un "crack" : dans ce cas de figure, le multiple de valorisation s’envole !

 

Pour que cela fonctionne, tout comme on sélectionne un bon gérant, il est primordial de s’entourer de professionnels qui sauront trouver les bons chevaux à acheter au juste prix et sauront les valoriser pour les revendre au meilleur prix. Il est donc possible que l’on soit passionné ou non de cheval, d’envisager une diversification de ses investissements au travers de l’investissement dans un club deal 100 % cheval !

 

Charlène Nespoulous, présidente, Nespoulous Gestion Privée

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