L'avocate pénaliste Isabelle Coutant-Peyre s’en est allée

Le barreau français vient de perdre une figure marquante. Isabelle Coutant-Peyre est décédée le vendredi 12 avril à l’âge de 70 ans. D’un cancer. Secrétaire de la Conférence en 1986, l’avocate faisait partie des grands pénalistes français. Elle a vécu une vie aux allures d’un scénario de film.

Mari idéal

C’est au sein d’une famille bourgeoise et catholique que naît Isabelle Coutant-Peyre en 1953. De son premier mariage en 1974 avec un élu local centriste, elle gardera le nom –Michel Peyre – et trois enfants. Elle divorcera en 1993. De son second mariage, elle gardera l’étiquette : celle d’épouse du terroriste Carlos. On imagine l’agacement de celle qui a toujours refusé d’être considérée comme la “femme de”. Elle dira de son époux emprisonné à perpétuité sur le plateau de Thierry Ardisson qu’il est le mari idéal : “Il me laisse tranquille toutes les nuits.”

Charles Libman, avocat de la Licra et ami de son père, lui transmet le virus de la profession d’avocat. En 1979, elle prête serment devant la cour d’appel de Paris, après des études en droit des affaires. Sa carrière, elle la lance aux côtés de l’énigmatique Jacques Vergès dont elle devient l’associée en 1981. Il venait de refaire surface après sa mystérieuse disparition entre 1970 et 1979. Depuis ces années, Isabelle Coutant-Peyre a toujours repris l’interlocuteur qui l’appelait avocate. “Pourquoi dire avocate au lieu d’avocat, on exerce le même métier.”

Elle défend Ilich Ramirez Sanchez, dit Carlos depuis 1997 pour ses procès en France. Elle assistera d’autres noms connus du crime comme le tueur en série Charles Sobhraj alias “le Serpent“, Youssouf Fofana, le chef du “gang des barbares”, ou encore Ali Riza Polat, condamné à trente ans de réclusion criminelle pour complicité dans les attentats contre Charlie Hebdo et l'Hyper Casher en janvier 2015.

Sur d’autres terrains de la défense pénale, elle sera l’une des avocates de Dieudonné et de la société des Productions de la Plume et de l'écrivain Gabriel Matzneff, accusé de pédocriminalité.

 Isabelle Coutant-Peyre expliquera à la journaliste Charlotte Piret qu’elle a deux passions, “l’international et les militants politiques”. Elle lui confiera également ces mots qui ne trompent pas sur ses idéaux et sa philosophie : “Lorsque tous les autres recours ont été épuisés, alors il est parfaitement juste de tirer l’épée.” Avocate passionnée, elle se disait abolitionniste des prisons, parce qu’elle pensait qu’on peut régler les problèmes des sociétés autrement.

Anne-Laure Blouin