Jérôme Tixier (L'Oréal): « L’entreprenariat est dans nos gènes»
Décideurs. L’innovation concerne de plus en plus les ressources humaines, pourquoi est-ce un domaine où il faut innover ?
Jérôme Tixier. Les RH sont au cœur de l’innovation parce que le contexte économique et social évolue à une vitesse inédite, avec des transformations qu’il faut accompagner sur le plan humain. Le digital, les nouvelles concurrences, l’évolution des métiers, le changement de rapport au travail ou encore la nouvelle géographie de nos marchés… sont autant de paramètres qui appellent à innover en RH. Un exemple : la stratégie d’universalisation que nous menons et qui consiste à être global tout en collant aux besoins très locaux, nécessite une diversité toujours plus grande de notre pool de talents. Rester attractifs en externe et engager en interne sont également des enjeux clés qui requièrent de l’innovation partout : des façons de recruter, au management en passant par le développement. Et innover en RH chez L’Oréal, c’est d’abord partir des besoins exprimés.
Quels sont les axes majeurs d’innovation chez L’Oréal ? Lequel vous tient particulièrement à cœur ?
Nous innovons dans nos façons de travailler, pour que le collaboratif soit central, l’organisation du travail de plus en plus flexible et nos managers accompagnés pour être des leaders et des coachs. Autre axe d’innovation, la qualité de vie et la protection des salariés et, à ce titre, le programme Share & Care me tient particulièrement à cœur car il est réellement innovant par son ampleur. Share and Care a permis d’installer des garanties minimales et universelles de protection sociale dans tous nos pays et dans quatre domaines : la prévoyance, la santé, la parentalité et la qualité de vie au travail. Cela représente aujourd’hui, au-delà d’un socle imposé, plus de 300 initiatives sociales prises par nos filiales. Et concrètement, dans certains pays cela veut dire que les femmes ont vu leur congé maternité doubler grâce aux quatorze semaines du programme. Autre exemple, en France, plus de 1 000 salariés sont en télétravail à raison de deux jours par semaine aujourd’hui.
La formation est un autre axe majeur et nous misons notamment sur un système de digital learning en pointe, qui permet aux collaborateurs d’être acteurs de leur développement et à l’entreprise de gagner en réactivité : nous avons ainsi formé en un an plus de 6 000 marketeurs au « digital marketing ». Plus de 100 000 heures de formation en ligne ont été délivrées en 2016. L’objectif est d’accélérer encore par des partenariats avec les leaders comme Coursera, la start-up leader des MOOCs.
Nous saisissons aussi toutes les opportunités du digital pour la détection, le recrutement et la gestion des talents : très présents sur les réseaux sociaux, nous avons plus de un million de followers sur LinkedIn, et un mot d’ordre : la transparence. Nous prêtons aussi une grande attention à Glassdoor, en tenant compte de tous les commentaires dans une démarche d’amélioration.
Aujourd’hui, on constate une forte valorisation de l’entreprenariat, qu’en pensez-vous ? Comment le groupe accompagne-t-il cette démarche ?
C’est dans nos gènes ! Chez L’Oréal, tout collaborateur est encouragé à être « le CEO » de son projet, ce qui implique une responsabilité qui va de pair avec la possibilité réelle d’avoir un impact. La capacité à entreprendre est également valorisée dans notre recrutement. Notre compétition Brandstorm met chaque année 15 000 étudiants en posture de chef d’entreprise. Cet angle entrepreneurial qui est privilégié dans nos partenariats avec les écoles, à l’image du partenariat récent avec HEC où nous soutenons l’incubateur et le Dare Award qui récompense la prise d’initiative au sein de start-up.
Propos recueillis par Roxane Croisier