La fin de l’année 2016 aura été marquée par des évolutions importantes du suivi de la santé du salarié par le médecin du travail. La loi « travail » du 8 août 2016 l'a en effet profondément remanié.

Dans une volonté déclarée de simplification, mais également et de manière plus pragmatique pour faire face à la pénurie de médecin du travail, l’article 102 de la Loi du 8 aout 2016 a tout d’abord profondément réformé la visite médicale d’embauche. Celle-ci qui était auparavant obligatoire pour l’ensemble des salariés, est désormais remplacée par une visite d’information et de prévention qui peut être effectuée selon l’article L 4624-1 du Code du travail par le médecin du travail mais également par le collaborateur médecin, l'interne en médecine du travail ou l'infirmier.

 

Le décret du n°2016-1908 du 27 décembre 2016 vient préciser que cette visite doit intervenir dans un délai de 3 mois à compter et de la prise effective du poste. Celle-ci a pour objet d’interroger le salarié sur son état de santé, de l’informer sur les risques éventuels auxquels l’expose son poste de travail, de le sensibiliser sur les moyens de prévention à mettre en œuvre, d’identifier si son état de santé ou les risques auxquels il est exposé nécessitent une orientation vers le médecin du travail et de l’informer sur les modalités de suivi de son état de santé par le service ainsi que sur la possibilité dont il dispose, à tout moment, de bénéficier d’une visite à sa demande avec le médecin du travail.

 

De ce fait, il n’y aura plus, pour le salarié n’occupant pas de poste à risque, d’avis d’aptitude au poste de travail qui sera émis par le service de médecine du travail au moment de l’embauche ce qui est particulièrement surprenant au regard du développement de l’obligation de sécurité pesant sur l’employeur lequel ne pourra plus se fonder sur l’avis de médecin du travail pour s’assurer de la capacité du salarié à occuper son poste de travail.

 

Ainsi, la visite médicale d’embauche donnant lieu à un avis d’aptitude au poste est désormais réservée au salarié occupant des postes « à risque » tels que définis à l’article R. 4624-23 du Code du Travail issu du décret du 27 décembre 2016 et qui vise les travailleurs exposés :

  • A l'amiante ;
  • Au plomb dans les conditions prévues à l'article R. 4412-160 ;
  • Aux agents cancérogènes, mutagènes ou toxiques pour la reproduction mentionnés à l'article R. 4412-60 ;
  • Aux agents biologiques des groupes 3 et 4 mentionnés à l'article R. 4421-3 ;
  • Aux rayonnements ionisants ;
  • Au risque hyperbare ;
  • Au risque de chute de hauteur lors des opérations de montage et de démontage d'échafaudages.

 

La visite médicale doit alors être réalisée préalablement à l'affectation sur le poste (et sans que soit visé comme auparavant avant l’expiration de la période d’essai) et est de la compétence exclusive du médecin du travail. celle-ci a pour objet de s'assurer que le travailleur est médicalement apte au poste de travail auquel l'employeur envisage de l'affecter, notamment en vérifiant la compatibilité du poste avec l'état de santé du travailleur qui y est affecté, afin de prévenir tout risque grave d'atteinte à sa santé ou à sa sécurité.

 

Mais en outre, ces dispositions sont complétées par un aliéna prévoyant que « S'il le juge nécessaire, l'employeur complète la liste des postes entrant dans les catégories mentionnées au I. par des postes présentant des risques particuliers pour la santé ou la sécurité du travailleur ou pour celles de ses collègues ou des tiers évoluant dans l'environnement immédiat de travail mentionnés au premier alinéa de l'article L. 4624-2, après avis du ou des médecins concernés et du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail ou, à défaut, des délégués du personnel s'ils existent, en cohérence avec l'évaluation des risques prévue à l'article L. 4121-3 et, le cas échéant, la fiche d'entreprise prévue à l'article R. 4624-46. (….)».

Or, on ne peut que s’inquiéter de ce transfert d’appréciation des risques du poste du médecin vers l’employeur. En effet, en cas de survenance d’un accident du travail à un salarié dont le poste n’aurait pas été qualifié de « poste à risque » par l’employeur alors même que celui-ci aurait pu présenter des caractéristiques particulières de risque ou de danger, la responsabilité de l’employeur notamment en cas de rupture du contrat de travail sera nécessairement recherchée et dès lors source de contentieux. C’est pourquoi, il appartiendra aux entreprises, notamment celles soumises à l’obligation de négocier sur la pénibilité, d’être particulièrement vigilantes sur la définition des postes à risque et de ne pas se contenter de la liste de l’article R4624-23 du Code du Travail.

 

A l’issue de la visite initiale, le salarié bénéficie d’un suivi médical dont la périodicité va également varier selon si le poste occupé est qualifié « à risque » ou non.

Ainsi, jusqu’au 31 décembre 2016, le salarié devait bénéficier d’un examen médical périodique tous les 24 mois. A compter du 1er janvier 2017 et en application de l’article R4624-16 du Code du travail, le salarié qui n’occupe pas un poste à risque devra bénéficier d'un renouvellement de la visite d'information et de prévention initiale, selon une périodicité qui ne peut excéder cinq ans. Ce délai est réduit à 3 ans pour les travailleurs de nuit pour les travailleurs handicapés.

 

Pour les salariés occupant des postes à risque, le suivi périodique auprès de la médecine du travail bénéficie, d'un renouvellement de la visite médicale selon une périodicité déterminée par le médecin du travail et qui ne peut être supérieure à quatre ans. En outre, une visite intermédiaire est effectuée par un professionnel de santé doit intervenir au plus tard deux ans après la visite d’embauche avec le médecin du travail.

 

Enfin, si les causes imposant à l’employeur d’organiser une visite de reprise n’ont pas évoluées, on constatera que l’article R4624-23 est remplacé par l’article R4624-33 lequel ne prévoit plus de déclaration d’aptitude mais seulement une vérification que l’état de santé du salarié est compatible avec le poste de travail qu’il  doit reprendre le travailleur ou le poste de reclassement auquel il doit être affecté et de préconiser d’éventuels aménagement ou adaptations. Une fois encore, on peut craindre que la disparition d’un avis d’aptitude clair soit source de contentieux et d’incompréhension, entre l’employeur, le salarié et le médecin du travail et imposera des contestations plus importantes des avis médicaux qui seront désormais portées devant la formation de référés du Conseil de Prud’hommes dans un délai de 15 jours à compter de leur notification.

 

De ce fait, on ne peut dire que l’action de simplification voulue par le gouvernement soit véritablement atteinte et on assiste vraisemblablement à un transfert de l’appréciation du risque du poste de travail vers l’employeur ce qui n’est pas véritablement sécurisant au regard de l’obligation de sécurité de résultat que lui incombe la jurisprudence.

 

 

Maxime de Margerie

Avocat Associé, Capstan Avocats

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