Sandrine Scheer (Adidas) : « Nous cherchons à connaître les sources d’énergie de nos collaborateurs »
Décideurs. Adidas est connue pour ses actions en matière de qualité de vie au travail. De manière générale, les entreprises y sont-elles d’après vous de plus en plus sensibles ?
Sandrine Scheer. D’après ce que j’entends et lis, je pense qu’on peut affirmer que la qualité de vie au travail est de plus en plus à l’esprit des dirigeants comme des directions des ressources humaines. À l’évidence, le bonheur au travail est un sujet très actuel. Prenons l’exemple des entreprises libérées, très médiatisé. Certaines entreprises le sont depuis trente ou quarante ans, mais c’est seulement maintenant qu’on en parle… On est clairement en train de repenser le cadre professionnel au vu des évolutions de la société.
Comment convaincre les dirigeants qui ne sont pas encore sensibles au sujet de s’y atteler?
C’est une question difficile… Il existe bien entendu des outils, même des tactiques, mais si le dirigeant n’y croit pas, il y aura toujours un décalage entre la parole et les actes. Il est impératif qu’il soit animé par une conviction profonde, qu’il croie fondamentalement que ce qui fait la valeur d’une entreprise c’est la valeur des hommes. Ceci étant dit, bien sûr que pour échanger avec un dirigeant, il est nécessaire d’être concret, et montrer que l’on a une capacité à mettre du bon sens dans les actions accomplies par les ressources humaines.
Comme le fait de faire référence au ROI des actions de QVT par exemple ?
Oui et non. Il faut se méfier du raisonnement ROI pour ce type de sujets… On parle d’actions pour lesquelles le lien de cause à effet est difficile à établir. C’est bien pour cela que notre métier est complexe ! Cela dit, nous avons bien sûr quelques outils. Le palmarès Great Place to Work notamment est intéressant car il conduit à réaliser un audit de nos pratiques RH et nous confronte à la perception qu’en ont nos collaborateurs. Nous avons également lancé un baromètre mensuel par lequel nous cherchons à connaître les sources d’énergie de nos collaborateurs. C’est essentiel. Lorsqu’elle entreprend une ascension en montagne, ce n’est pas la compétence technique qui fait qu’une cordée arrive au sommet, c’est son mental.
Quels sont les prochains chantiers de votre politique RH ?
Le chantier majeur est celui de la gestion des ressources : mettre en avant les compétences et placer les collaborateurs là où ils sont bons. Et puis nous devons également aller vers plus de transversalité.
Adidas s’apprête à déménager son siège social dans le quartier d’affaires de Strasbourg. Comment cela a-t-il été préparé ?
Effectivement, nous allons déménager en début d’année 2018. Ce déménagement a été inséré dans notre projet d’entreprise à l’horizon 2020. Lorsque nous l’avons annoncé, nous avons organisé une grande réunion au Zénith de Strasbourg. Quatre grands murs noirs ont été dressés sur lesquels les salariés pouvaient écrire à la craie leurs idées. Nous nous en sommes inspirés pour orienter nos architectes. Nous nous sommes également beaucoup inspirés des nouvelles pratiques, notamment en réduisant le nombre d’espaces individuels pour augmenter le nombre d’espaces collaboratifs. Nous avons voulu conserver notre ancrage local pour des raisons humaines, mais également parce que notre culture est liée à l’Alsace. Nous avons en quelque sorte une assise sur deux pieds forts : un pied culturel, qui est l’Alsace, et un pied « brand », localisé à Paris.
Propos recueillis par Marie-Hélène Brissot