« Un leader doit savoir se projeter dans l’avenir et se soucier tout autant de l’exécution »

Décideurs. En tant que P-DG, comment conciliez-vous confiance en soi et humilité??
Alexandre Lubot. Pour être un leader, les deux sont complémentaires. La confiance en soi se bâtit sur les sujets que l’on maîtrise et l’expérience que l’on accumule. Et je fais preuve de modestie face à des situations ou des sujets que je ne connais pas et que je dois apprendre. Lors de ma nomination au poste de P-DG par exemple, je savais que je ne pouvais connaître tous les sujets. En dehors de bien m’entourer, j’ai fait appel à un coach pendant quelques mois. Cela m’a permis d’être plus efficace dans la prise de mes nouvelles responsabilités pour garantir les bonnes performances de l’entreprise. Parce que le monde digital est en évolution constante et rapide, l’humilité et la remise en cause régulière sont des valeurs essentielles.

Décideurs. Selon vous, comment guider sans freiner les forces de propositions??
A.?L. Depuis quelques années, nous avons modifié l’organisation du groupe. Auparavant, l’entreprise était structurée par un style managérial assez vertical et directif. Désormais, la nouvelle configuration intègre un niveau intermédiaire de management réparti en fonction des différentes missions. Un système plus propice à la communication, où chaque nouvelle idée compte et dans lequel la direction accepte de déléguer une partie du pouvoir de décision. Cette organisation favorise à la fois le leadership collectif et la motivation de nos collaborateurs qui se sentent plus impliqués. Une dynamique essentielle qui permet de cultiver cette notion de partage, qui encourage les personnes à faire des propositions et à donner leur point de vue.

Décideurs. Comment faites-vous pour être l’homme du présent quand vous devez sans cesse vous tourner vers le futur??
A.?L. Un bon leader doit selon moi autant se soucier de la qualité des stratégies définies que de leur exécution. Un de mes anciens patrons avait coutume de dire que l’exécution est la seule stratégie vue et vécue par nos consommateurs… Très vrai. Chacun dans les équipes porte une part de la qualité d’exécution. C’est ce qui crée une alchimie entre le court et le long terme. Je ne crois pas à la culture du héros, capable de tout gérer et résoudre dans l’entreprise. Cette politique de gouvernance me permet de penser tous les jours au futur tout en suivant l’opérationnel, à savoir le moment présent. Pour un leader, savoir se projeter est une qualité nécessaire. Cela fait quinze ans que nous nous imposons comme leader sur le marché que nous avons créé. Une performance rendue possible grâce à notre faculté à anticiper mais aussi à la justesse de nos actions sur le court terme.

Décideurs. Selon vous, quels ingrédients du leadership ne sont pas assez mis en lumière??
A.?L. Le premier élément auquel je pense est l’écoute externe. Elle permet d’analyser les opportunités et les menaces du marché pour mieux comprendre son environnement. D’un autre côté, la prise de risque est également une composante essentielle, peu mise en exergue. En Europe, les personnes dissimulent leurs échecs et se focalisent sur la réussite. Ce phénomène inhibe la prise 
d’initiative. Or, mettre l’accent sur les défaites et surtout en apprendre permet d’avancer dans l’entreprise.

Propos recueillis par R. T.

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