« On est plus intelligent à plusieurs »
Décideurs. Selon vous, qu’est-ce que le leadership??
Gilles Pélisson. C’est l’art d’entraîner les autres avec autorité et exemplarité. C’est aussi savoir motiver ses collaborateurs en donnant du sens à l’action et en les responsabilisant. Un leader doit avoir la tête dans les étoiles et les pieds sur terre pour construire des projets. Dans les sociétés que j’ai dirigées, j’ai toujours essayé d’établir un plan de marche et de ne pas en dévier.
Décideurs. Le leadership peut-il s’enseigner??
G.?P. Il y a une part innée, notamment dans sa dimension charismatique. Certaines personnes ont ce sens du leadership mais ne savent pas s’organiser. D’autres, au contraire, sont à l’aise dans le management mais ont du mal à prendre de la hauteur. Néanmoins, mon expérience m’a montré que ces lacunes ne sont pas rédhibitoires. On peut travailler sur ces deux points. Pour ma part, j’ai tout de suite eu envie de me confronter à des postes très opérationnels car je pense qu’ils sont les plus formateurs. Alors que j’avais été contacté par des sociétés de conseil après l’obtention de mon MBA de Harvard, j’ai fait le choix de travailler dans le marketing opérationnel d’une chaîne de restaurants américaine.
Décideurs. Comment faites-vous usage de votre autorité??
G.?P. Un leader doit être capable de mettre en place un bon niveau de délégation. Dans les sociétés de services comme TF1, ce qui prime c’est notre capacité à réagir. Ce n’est pas un signe de faiblesse d’associer ses collaborateurs à la prise de décision, au contraire. On est plus intelligent à plusieurs. C’est d’ailleurs aussi à cela que l’on reconnaît un grand leader, dans sa capacité à s’entourer des meilleurs. Néanmoins, la démocratie a aussi ses limites. Quand il s’agit de trancher, il est clair que cela doit être de la responsabilité du leader.
Décideurs. Comment gérez-vous vos doutes??
G.?P. En les partageant avec mes collaborateurs. J’échange également avec ma femme que je considère comme une sparring partner. Communiquer permet de mieux poser ses idées et donc de mieux réfléchir. Avec le temps, j’ai aussi appris à temporiser. J’avais tendance à réagir avec excès dans certaines circonstances. Désormais, j’apprends à prendre le temps. Bien sûr, il ne faut pas tomber dans le piège inverse de l’immobilisme. Il vaut mieux prendre 80?% de bonnes décisions rapidement que 100?% sur un temps long.
Décideurs. Comment gérez-vous l’ego des personnalités médiatiques du groupe??
G.?P. Je n’y accorde pas beaucoup d’importance. Si nos animateurs et journalistes vedettes sont plus sous les projecteurs représentant notre marque auprès de nos publics, je considère que, dans une entreprise, tous les métiers sont égaux. L’important est que tout le monde se sente intégré et puisse cohabiter. Chez Disney, il y avait une journée par an intitulée «?Show Time?» où toutes les fonctions support allaient au contact des clients. Je me suis ainsi retrouvé à nettoyer le parc ou à l’intérieur d’un personnage Disney pour la parade. C’est une façon de bien comprendre ce que chacun peut ressentir, quel que soit son niveau.
Propos recueillis par V. P.
http://www.magazine-decideurs.com/dossiers/leadership-l-art-de-gerer-les-paradoxes