Les Fintechs réinventent la gestion d'actifs
Un marché en pleine croissance
Bien qu’elle ait suivi la voie des fintechs après les États-Unis, l’Asie, ou certains pays européens, la France a bien rattrapé son retard. « Le marché français est l’un des plus dynamiques en Europe », se félicite Alain Clot, président fondateur de France FinTech. Selon le baromètre de l’association et de BPIfrance, les fintechs tricolores ont levé au premier semestre 2021 près d’un milliard et demi d’euros. Le marché connaît la plus forte croissance européenne, mais demeure derrière le Royaume-Uni et l’Allemagne. Si le pays n’a pas à rougir du nombre de ses levées de fonds, elle manque de « méga deals » à l’image du marché américain. Le leader mondial Stripe, facilitateur de paiement en ligne, réalisait cette année une levée de fonds de 500 millions d’euros, portant sa valorisation à 80 milliards d’euros et faisant de la plateforme la plus grosse licorne de son pays.
Cryptomonnaies, crowdfunding, moyens de paiement... Les solutions offertes par les fintechs font désormais partie de notre quotidien. En rendant les services financiers plus abordables, ces startups poussent les banques traditionnelles à se réinventer.
« Buy Now Pay Later »
Secteur porteur du marché des fintech, les services de paiement ont été favorisés par la crise sanitaire et l’expansion des achats en ligne. La fintech Oneybank, majoritairement détenue par le groupe bancaire BPCE, domine l’écosystème dans l’Hexagone, tout comme Floa Bank, récemment acquise par BNP Paribas. Après s’être imposée sur le marché français du paiement entre particuliers, Lydia devient une licorne valorisée à un milliard de dollars. Portée par son développement exponentiel, la structure a récemment annoncé l’accès, pour ses 5,5 millions d’utilisateurs, à l’investissement dans des cryptomonnaies, des métaux précieux, des ETF ou des entreprises, dès la fin de l’année. Une première dans le secteur de la finance qui se met à la portée de tous.
"Le marché français est l’un des plus dynamiques en Europe"
La mutation du secteur entraîne l’apparition de nouveaux enjeux. Parmi eux, on peut distinguer la régulation du paiement fractionné, celui-ci échappant aux contraintes réglementaires bancaires. La crainte des autorités que les ménages aient un recours accru aux solutions de financement différé, subsiste. Malgré cette discordance, la hache de guerre est enterrée entre fintechs et banques, chaque camp trouvant des intérêts à collaborer. Les premières apportent leur culture innovante et les secondes une application à grande échelle. Les startups de la finance parviennent à animer un secteur pourtant très réglementé. Pour cela, elles bénéficient de relations de plus en plus apaisées avec les institutions traditionnelles et les régulateurs. La manière dont ces sociétés innovantes et disruptives ont perturbé les secteurs de la banque et des paiements constitue une révélation pour les gérants d’actifs qui réestiment l’impact des fintechs sur leurs activités.
Une complémentarité revendiquée
Ces entreprises conçoivent une technologie numérique innovante en vue d’optimiser un service financier en pleine expansion, et la gestion d’actifs ne fait pas exception. La fintech traditionnelle est constituée de grandes entreprises technologiques bien établies, ce qui lui permet de bénéficier d’une visibilité. Les sociétés de gestion d’actifs et de patrimoine qui souhaitent être avant-gardistes, ont la possibilité de former des partenariats stratégiques avec ces nouveaux acteurs. L’essor des robo-advisors – ainsi que la prolifération des outils d’intelligence artificielle – a transformé la manière dont les conseillers financiers interagissent avec leurs clients et leur fournissent des services.
"Lydia devient une licorne valorisée à un milliard de dollars"
Big data, intelligence artificielle (IA), machine learning... Ces technologies permettent aux gérants d’actifs d’améliorer leur traitement de données et donc, leur productivité. Elles apportent une expérience utilisateur simplifiée, tout en donnant accès à de nouvelles classes d’actifs. En automatisant des tâches, les outils d’IA les aident à prendre de meilleures décisions d’investissement et à réduire leurs coûts. Ils constituent les nouveaux enjeux de l’industrie et répondent à un souci croissant d’autonomie dans le suivi et le pilotage des actifs. Le besoin de reprendre la main sur son patrimoine se manifeste, notamment chez les millennials, plus enclins à se tourner vers les technologies.
Objectif commun assumé : offrir au plus grand nombre, par le biais des robo-advisors, des stratégies d’investissement innovantes. C’est notamment le cas de Yomoni, première société de gestion de type robo-advisor en France, qui ne réalise ses allocations qu’à partir de fonds tiers : « Nous utilisons des modèles quantitatifs développés et supervisés en interne par une équipe de gestion expérimentée, déclarait Sébastien d’Ornano aux Échos, président exécutif de Yomoni. À l’avenir, nous pourrions imaginer de proposer nos propres fonds. » Finalement, les sociétés de gestion de patrimoine qui sont capables d’adopter les nouveaux outils fintech – tout en aidant les investisseurs à s’orienter dans un paysage financier de plus en plus complexe – auront plus de chances de se développer et de prospérer.
"Une technologie numérique innovante en vue d’optimiser un service financier"
L’émergence des fintechs n’implique pas forcément le déclin des acteurs traditionnels. Au contraire, ce changement représente une opportunité pour ceux qui sauront entreprendre les bonnes actions et faire preuve de proactivité dans la gestion du changement. Malgré la multiplication des données et des outils d’analyse qui permet une offre plus large, la valeur ajoutée de l’humain reste essentielle et n’est pas remise en cause. Intégrer des fintechs de petite taille représente pour les banques et les sociétés de gestion, une opportunité de développer un avantage concurrentiel et d’étendre leurs activités à de nouveaux marchés.
Juliette Woods