Entretien avec Gérald Karsenti P-DG, Hewlett-Packard France
Gérald Karsenti, « Le leader va s’extraire de cette complexité du monde pour la rendre simple »
Décideurs. Quels sont les ingrédients nécessaires au leadership qui ne sont pas assez mis en lumière ?
Gérald Karsenti. Je pense que le leadership est très situationnel. Le contexte dans lequel on évolue peut largement contribuer à faire ressortir les qualités intrinsèques d’un individu, lui donnant le statut de leader. Par exemple, la Seconde Guerre mondiale a sans doute fait de Winston Churchill l’homme qu’il a été. Lorsque l’on analyse le leadership, il faut prendre en compte non seulement des qualités propres mais également l’écosystème dans lequel l’individu évolue. Un leader a un rôle à jouer mais le leadership n’implique pas le pouvoir : tout individu dans l’entreprise peut, par la force et la passion qu’il véhicule, influencer et motiver un grand nombre de personnes. Ce qui m’amène à dire que le leadership doit être déconnecté de la notion de management. Ainsi ce n’est pas la position hiérarchique qui fait le leader mais la façon dont il est perçu par les « followers ». Vous pouvez devenir un leader sans même vous en rendre compte et, a contrario, chercher à devenir un leader toute votre vie sans jamais l’être. Pour résumer, l’équation du leader c’est : un rôle clair et défini, un périmètre d’action – le leader doit avoir les moyens de faire aboutir son plan ou ses idées –, une légitimité, sans doute le point le plus important, et un style – un leader doit bien se connaître et assumer. Je crois beaucoup au fait que le leadership suit l’évolution du monde. Aujourd’hui, nous sommes dans une phase de changement profond de modèle.
Décideurs. Quelles sont ces qualités nouvelles du leadership que vous voyez émerger ?
G. K. Tout d’abord, le leader de demain est quelqu’un qui voit plus loin que le court terme. Un dirigeant est guidé par la valorisation de son entreprise, mais délivrer des chiffres que les marchés attendent, répondre à l’immédiateté peut l’amener à prendre de mauvaises décisions pour le moyen/long terme. Je pense que la première grande qualité d’un leader est de percevoir avant les autres les impulsions et les axes de croissance du marché. D’autre part, un leader met en place les bonnes personnes aux bons postes, et surtout, il n’a pas peur de promouvoir les talents. Il n’est pas dérangé par le fait d’avoir autour de lui des gens brillants et s’enrichit de leurs qualités. Enfin, le leader doit inspirer la confiance et donner envie, il est naturellement optimiste. Je n’en ai jamais rencontré de pessimiste. Il a toujours un plan B si un quelconque élément l’empêchait d’avancer. C’est à ce moment qu’il arrive à entraîner les gens, à porter son projet, sa passion. La vision, l’altruisme et la confiance sont trois ingrédients clés du leader de demain.
Décideurs. Vous évoquez la passion. Comment peut-elle être motrice d’une équipe ?
G. K. On a longtemps considéré le leadership comme un acte de communication et il y a là un fond de vérité : le leader charismatique parle bien, de façon claire. Mais cela va bien au-delà. Il est celui qui va s’extraire de cette complexité du monde pour la rendre simple. On a observé par des études empiriques que le leader a deux caractéristiques : il communique toujours de la même façon et toujours à l’opposé des autres. Je m’explique : aborder un sujet c’est définir le pourquoi, le quoi et le comment. Quelqu’un qui n’est pas dans un acte de leadership aura tendance à se concentrer sur les deux dernières questions. Le leader oublie rarement le pourquoi. Par exemple, Meg Whitman chez HP explique clairement pourquoi elle veut transformer l’entreprise. Parce que c’est une entreprise mythique de la Silicon Valley, nous avons ce but ultime de donner à nos clients les meilleures technologies possibles et de leur changer leur mode opératoire. Elle donne du sens, elle entraîne les gens dans son projet.
Décideurs. Un leader peut-il avoir des doutes ?
G. K. Je pense qu’il faut faire la différence entre le doute et le questionnement : le leader se questionne constamment, il se fie à ses intuitions, mais il sait où il veut aller. Il écoute mais il ne retiendra pas tout. Il cherche à s’assurer qu’il ne passe pas à côté de quelque chose et qu’il prend la bonne direction. Dans ce monde complexe, on sait un peu sur beaucoup de sujets mais nous ne sommes plus vraiment experts d’un tout. Les leaders que j’ai vu réussir n’ont fondamentalement pas de doutes. Douter c’est inévitablement renvoyer une image négative de soi-même. Un véritable leader ne se laissera pas entraver par ses doutes.
Gérald Karsenti. Je pense que le leadership est très situationnel. Le contexte dans lequel on évolue peut largement contribuer à faire ressortir les qualités intrinsèques d’un individu, lui donnant le statut de leader. Par exemple, la Seconde Guerre mondiale a sans doute fait de Winston Churchill l’homme qu’il a été. Lorsque l’on analyse le leadership, il faut prendre en compte non seulement des qualités propres mais également l’écosystème dans lequel l’individu évolue. Un leader a un rôle à jouer mais le leadership n’implique pas le pouvoir : tout individu dans l’entreprise peut, par la force et la passion qu’il véhicule, influencer et motiver un grand nombre de personnes. Ce qui m’amène à dire que le leadership doit être déconnecté de la notion de management. Ainsi ce n’est pas la position hiérarchique qui fait le leader mais la façon dont il est perçu par les « followers ». Vous pouvez devenir un leader sans même vous en rendre compte et, a contrario, chercher à devenir un leader toute votre vie sans jamais l’être. Pour résumer, l’équation du leader c’est : un rôle clair et défini, un périmètre d’action – le leader doit avoir les moyens de faire aboutir son plan ou ses idées –, une légitimité, sans doute le point le plus important, et un style – un leader doit bien se connaître et assumer. Je crois beaucoup au fait que le leadership suit l’évolution du monde. Aujourd’hui, nous sommes dans une phase de changement profond de modèle.
Décideurs. Quelles sont ces qualités nouvelles du leadership que vous voyez émerger ?
G. K. Tout d’abord, le leader de demain est quelqu’un qui voit plus loin que le court terme. Un dirigeant est guidé par la valorisation de son entreprise, mais délivrer des chiffres que les marchés attendent, répondre à l’immédiateté peut l’amener à prendre de mauvaises décisions pour le moyen/long terme. Je pense que la première grande qualité d’un leader est de percevoir avant les autres les impulsions et les axes de croissance du marché. D’autre part, un leader met en place les bonnes personnes aux bons postes, et surtout, il n’a pas peur de promouvoir les talents. Il n’est pas dérangé par le fait d’avoir autour de lui des gens brillants et s’enrichit de leurs qualités. Enfin, le leader doit inspirer la confiance et donner envie, il est naturellement optimiste. Je n’en ai jamais rencontré de pessimiste. Il a toujours un plan B si un quelconque élément l’empêchait d’avancer. C’est à ce moment qu’il arrive à entraîner les gens, à porter son projet, sa passion. La vision, l’altruisme et la confiance sont trois ingrédients clés du leader de demain.
Décideurs. Vous évoquez la passion. Comment peut-elle être motrice d’une équipe ?
G. K. On a longtemps considéré le leadership comme un acte de communication et il y a là un fond de vérité : le leader charismatique parle bien, de façon claire. Mais cela va bien au-delà. Il est celui qui va s’extraire de cette complexité du monde pour la rendre simple. On a observé par des études empiriques que le leader a deux caractéristiques : il communique toujours de la même façon et toujours à l’opposé des autres. Je m’explique : aborder un sujet c’est définir le pourquoi, le quoi et le comment. Quelqu’un qui n’est pas dans un acte de leadership aura tendance à se concentrer sur les deux dernières questions. Le leader oublie rarement le pourquoi. Par exemple, Meg Whitman chez HP explique clairement pourquoi elle veut transformer l’entreprise. Parce que c’est une entreprise mythique de la Silicon Valley, nous avons ce but ultime de donner à nos clients les meilleures technologies possibles et de leur changer leur mode opératoire. Elle donne du sens, elle entraîne les gens dans son projet.
Décideurs. Un leader peut-il avoir des doutes ?
G. K. Je pense qu’il faut faire la différence entre le doute et le questionnement : le leader se questionne constamment, il se fie à ses intuitions, mais il sait où il veut aller. Il écoute mais il ne retiendra pas tout. Il cherche à s’assurer qu’il ne passe pas à côté de quelque chose et qu’il prend la bonne direction. Dans ce monde complexe, on sait un peu sur beaucoup de sujets mais nous ne sommes plus vraiment experts d’un tout. Les leaders que j’ai vu réussir n’ont fondamentalement pas de doutes. Douter c’est inévitablement renvoyer une image négative de soi-même. Un véritable leader ne se laissera pas entraver par ses doutes.