Beaux livres, BD, infographies, romans… Cette liste d’ouvrages à déposer au pied du sapin est adaptée à tous les types de lecteurs. Si vous séchez sur certains cadeaux, voici quelques idées.
Livres de Noël : quelques idées à déposer au pied du sapin
Lagaffe les rend malades
Tout auteur de BD qui reprend un personnage connu fait face à un dilemme : faut-il le "disrupter" en l’adaptant à l’époque et en faisant évoluer le graphisme ? Faut-il rester fidèle à l’original ? Le Québécois Delaf a choisi la deuxième option pour le premier album post-Franquin de Gaston Lagaffe. Sur ce plan, la mission est accomplie : on croirait lire un "vrai Gaston". La rédaction du Journal de Spirou n’a pas changé, tous les personnages sont au rendez-vous, qu’il s’agisse de Prunelle, Fantasio, l’agent Longtarin, Jules de chez Smith, Lebrac, Mademoiselle Jeanne ou encore Monsieur de Mesmaeker. On retrouve avec délectation des gags réguliers comme la signature de contrats, le gaffophone, la voiture farfelue… Mais aussi de nouvelles inventions comme le plafond attrape-mouche. Si Delaf réalise un travail de moine copiste, l’exercice est réussi, même en laissant de côté le monde du travail moderne (digital, management…). Quelques petites nouveautés sont toutefois observables dont une histoire complète sur douze pages, l’apparition d’un psychologue ainsi que des maladies professionnelles. Pour les plus curieux, une recension plus complète est à lire sur le lien ci-contre.
Le retour de Lagaffe, de Delaf, Dupuis, 48 pages, 12,50 euros
Positivez !
Inflation, situation internationale tendue, épidémie d’éco anxiété, l’actualité est morose. Et pourtant, de nombreux faits devraient nous donner des raisons de sourire et d’espérer. Dans cet ouvrage composé uniquement d’infographies (et donc à mettre entre toutes les mains, lecteurs rétifs y compris), le data journaliste anglais David McCandless porte un regard optimiste sur l’humanité. Santé, environnement, biodiversité, criminalité… Les choses vont globalement de mieux en mieux. Deux petits bémols à noter : les données ne sont pas classées par thématiques, ce qui laisse une impression de fouillis. Par ailleurs, les chiffres mis en avant sont mondiaux ou issus des pays anglo-saxons. Peu d’informations sur la France donc. Malgré tout, le livre mérite qu’on s’y attarde !
Le Grand Livre des bonnes nouvelles, Mille et une infographies pour se réjouir en un clin d’œil, de David McCandless, Robert Laffont, 256 pages, 23,90 euros
Talons d’Achille
Auguste, un paysagiste ambitieux, souhaite remporter un projet pour un beau jardin, mais Claire, sa commanditaire, lui demande de travailler main dans la main avec son architecte d’intérieur Henriette. Malgré un talent évident et une véritable implication, cette jeune femme est pétrie d’incertitudes qu’elle tente de masquer. En public, tout est bon pour tromper l’ennemi et ne pas révéler ses failles. Pourtant, les autres ne font-ils pas exactement la même chose? Le brusque Auguste cache son angoisse de se laisser dominer par son associée d’un jour. Claire, quant à elle, essaie de dissimuler les frayeurs qui la traversent lorsqu’elle se retrouve seule le soir. Dans son dernier roman, Raphaëlle Giordano nous fait subtilement comprendre que nous ne sommes pas seuls devant nos peurs. Plutôt que de nous accabler par crainte que les autres ne le fassent, acceptons les différentes faces de nos personnalités. Nous gagnerons en temps et en lumière.
Heureux les fêlés car ils laissent passer la lumière, de Raphaëlle Giordano, Récamier, 336 pages, 20,90 euros
Toutes les cartes en main
Pour mieux comprendre l’Histoire et les grands enjeux contemporains, les cartes sont précieuses. À cet égard, le nouvel Atlas historique mondial publié par Les Arènes, en association avec le magazine L’Histoire constitue un outil précieux. Les 600 cartes présentées et commentées donnent de nombreuses informations pour comprendre le passé et l’actualité en un coup d’œil. Le travail fourni est remarquable, esthétiquement alléchant et apporte un éclairage aux novices ou aux lecteurs déjà informés. Parmi les atouts de cet ouvrage, la mise en lumière d’une mondialisation déjà ancienne, le focus sur le monde extra-européen (indiens d’Amérique, royaumes hindous, dynasties chinoises ou perses), mais aussi sur les grands sujets d’actualité tels que le Covid-19 ou la guerre en Ukraine. Un incontournable qui plaira à tous les profils.
Atlas historique mondial, de Christian Grataloup, Charlotte Becquart- Rousset et Héloise Kolebka, Les Arènes – L’Histoire, 792 pages, 35 euros
Ceci n’est pas une exposition
Déjanté, esthétique, coloré, graphique… Le catalogue consacré à Wes Anderson est un bel hommage à son univers décalé. Les auteurs, Camille Mathieu et John Chiaramonte, se sont amusés à créer une exposition imaginaire sur le réalisateur texan. Au programme du parcours: le vestiaire, la bibliothèque, les cuisines ou encore le cabinet de souvenirs de voyages. On se plaît à dresser le parallèle entre l’iconique Davy Crockett et Sam, le jeune scout de Moonrise Kingdom, parti à l’aventure avec la belle Suzy pour rejoindre des territoires loin de la société humaine et peut-être retrouver l’innocence originelle. On redécouvre aussi l’importance de l’œuvre de Stefan Zweig dans la construction du long-métrage The Grand Budapest Hotel, qui évoque de manière nostalgique un lieu chéri s’effritant avec l’arrivée imminente de la dictature. Très riche, cet ouvrage est une belle dédicace au roi du détail et de l’accumulation dont le style est reconnaissable entre mille.
Le musée imaginaire de Wes Anderson, de Camille Mathieu et John Chiaramonte, Gründ, 232 pages, 34,95 euros
Levier de transformation
Le numérique et l’intelligence artificielle poussent nombre de métiers et de pratiques à évoluer, que ce soit pour rester à la page ou s’en emparer afin de repenser le monde. L’univers du design est loin d’être épargné par cette tendance. Dans son ouvrage, le designer et architecte français Jean-Louis Frechin dresse un rappel chronologique de cette discipline qui permet d’éclairer le futur. On est loin d’un manuel en kit qui donnerait au lecteur, après avoir parcouru quelques pages, l’impression de maîtriser son sujet. L’ouvrage est dense, mêle philosophie, références et cas pratiques. "L’art et la technologie sont deux faces d’une même médaille, écrit l’auteur. Le design ne peut s’exclure de sa propre raison d’être: domestiquer les technologies nouvelles." Le digital ouvre un nouveau chapitre dans l’histoire de cet art. Certains le considèrent comme un refuge, d’autres comme un mode de contestation ou une commodité. Dans tous les cas, il doit être "force de proposition et de production" afin de participer à l’élaboration des réponses aux défis de demain.
Le design des choses à l’heure du numérique et de l’intelligence artificielle, de Jean-Louis Frechin, FYP éditions, 256 pages, 24 euros
Des guerres et des hommes
L’art de combattre a bien évolué entre la guerre des Gaules et la Seconde Guerre mondiale. Les éditions Passés composés ont proposé à quatorze auteurs de retracer treize batailles qui ont marqué l’histoire de France entre -52 avant J.-C. et 1940 : Gergovie, Malplaquet, Valmy, entre autres. Les vignettes rappellent que l’art militaire – qu’il se pratique à cheval, en cotte de maille ou dans un avion – est violent et touche des individus qu’ils soient anonymes ou héros nationaux. Si les dessins, dans des styles parfois très différents, s’avèrent tous très réussis, on aimerait peut-être davantage de contexte autour des événements racontés afin de s’en rappeler les tenants et aboutissants. Toutefois, n’est-ce pas cela être sur le terrain en plein conflit ? Participer à une somme d’éléments particuliers qui, mis bout à bout, les uns après les autres, peuvent être analysés dans leur ensemble. Mais pas sur le coup, pas dans l’instant présent.
13 batailles – Une histoire de France, Passés composés, 187 pages, 25 euros
Toucher l’Amazonie
Baskets, super héros, mythologie, dessins de presse… Lorsque la maison d’édition Taschen s’approprie un sujet, elle le transforme bien souvent en or. C’est le cas avec l’Amazonie merveilleusement photographiée par Sebastião Salgado qui parvient à donner vie à une faune, une flore et des hommes menacés. L’ouvrage est également publié dans une édition originale et limitée qui permet de "toucher" la plus grande zone forestière du globe. Il prend la forme d’un coffret conçu avec la fondation VISIO pour les enfants et adultes déficients visuels. Cela donne lieu à un travail original qui réunit 18 photos en relief et 3 cartes géographiques pour offrir une expérience tactile originale. Pour les voyants, essayer de deviner une photo en fermant les yeux est une expérience à vivre.
Amazônia Touch, de Sebastião Salgado, Taschen, 200 euros
Lucas Jakubowicz, Olivia Vignaud